Le gouvernement américain a mis à exécution sa menace de porter plainte contre l'agence de notation Standard and Poor's (S&P) et sa maison mère McGraw-Hill pour avoir sciemment trompé les investisseurs avec leurs notes de produits adossés à des prêts hypothécaires à risque.

C'est la première fois que le gouvernement américain porte plainte contre une agence de notation alors qu'il s'en est jusqu'alors surtout pris aux banques qui avaient conçu ces produits dérivés risqués, à l'origine de la crise financière et économique la plus grave depuis la Grande Dépression.

«De septembre 2004 à octobre 2007 au moins, dans le district de Californie ou ailleurs», McGraw-Hill, par l'intermédiaire de sa filiale S&P, a «en toute connaissance de cause et avec l'intention d'induire en erreur, conçu et exécuté un système pour tromper les investisseurs» avec ses notations de produits financiers dérivés de crédits hypothécaires, explique la plainte, déposée tard lundi.

S&P a présenté «de façon erronée ses notes de crédit de titres dérivés de prêts hypothécaires comme objectives, indépendantes et dénuées de conflits d'intérêts», car elle cherchait à accroître sa part de marché avec des notes complaisantes, détaille la plainte du Département de la Justice.

«S&P a fait croire aux institutions financières qui ont investi dans ces dérivés de crédits hypothécaires que ses notes représentaient sa véritable opinion sur le risque de crédit de ces titres alors que ce n'était pas le cas», insiste-t-elle.

Cette «tromperie a joué un rôle clé dans les décisions d'investissement des institutions financières et celles-ci ont subi des pertes de plus de 5 milliards de dollars», alors que nombre d'entre elles étaient assurées par le gouvernement fédéral, précise la plainte.

L'exposition très élevée de nombreuses banques à ce type de produits avait été l'une des causes principales de la crise financière mondiale qui avait débuté en 2007-2008, conduisant à la faillite de banques comme Lehman Brothers mais aussi à la ruine de nombreux épargnants.

Standard and Poor's avait répliqué au ministère avant même l'annonce officielle de la plainte, en affirmant dans un argumentaire de trois pages que ces poursuites étaient «infondées» et que l'agence faisait alors face à un environnement «volatil» sans précédent.

Lundi, annonçant avoir été informée de l'intention du ministère de la poursuivre, elle avait souligné que les autres agences de notation avaient émis des notes similaires aux siennes.

Les grandes agences de notation (S&P, Moody's et Fitch) ont été beaucoup critiquées pour ne pas avoir vu venir la crise, et les législateurs des deux côtés de l'Atlantique ont tenté d'en tirer les leçons en régulant davantage leurs