Tant le gouvernement fédéral que la Banque du Canada se préparent à parer les effets néfastes qu'aurait sur notre économie l'absence de compromis budgétaire aux États-Unis.

«Nous pourrions réagir rapidement», a assuré hier Mark Carney, gouverneur de la Banque du Canada, peu après son allocution devant le Cercle canadien qui portait sur la réforme en cours du système financier mondial.

Tout en précisant que la Banque s'attend à ce que le Congrès parvienne à dessiner un compromis qui aplanirait quelque peu le mur budgétaire de plus de 600 milliards US qui guette l'économie américaine le 1er janvier, M. Carney a précisé: «Nous n'avons pas de renseignement spécial. C'est la principale menace, le risque le plus immédiat qui pèse sur l'économie canadienne.»

Le mur budgétaire (fiscal cliff) est la somme de réductions des dépenses automatiques et de l'échéance de baisses d'impôts. Leur effet conjugué ferait perdre quatre points, peut-être jusqu'à cinq points de pourcentage à la croissance de l'économie américaine, ce qui est amplement suffisant pour la replonger en récession.

Sa conséquence immédiate serait de diminuer les exportations canadiennes, les investissements des entreprises et la confiance, ce qui pourrait être suffisant pour compromettre la faible expansion de notre économie. «Si les États-Unis décident de foncer, les autorités canadiennes ont de la flexibilité», a tenu à assurer M. Carney, sans autre précision.

Il faut rappeler que la banque centrale du Canada est la seule du G7 qui est parvenue à normaliser quelque peu son taux directeur depuis la récession. Elle est aussi la seule à ne pas avoir activé la planche à billets. Quant à Ottawa, il est parmi les seuls gouvernements à suivre un plan de match vers un retour à l'équilibre budgétaire.

Le gouverneur a aussi rappelé d'autres risques moins immédiats: la crise européenne qui paraît contenue et aussi le ralentissement chinois qui semble tirer à sa fin et le rythme des mises en chantier qui demeure bien supérieur à celui de la formation des ménages.

Au chapitre de la stabilité financière, le gouverneur a insisté sur la solidité des banques canadiennes, dont le ratio de la valeur de l'actif sur les fonds propres (ce qu'on appelle l'effet de levier) n'excède pas 20.

Il a souligné qu'elles ont pu accroître de 67 milliards la valeur de leur capital-actions depuis 2007 tout en augmentant la valeur de leurs actifs.

Leurs concurrentes étrangères n'ont pas un tableau aussi reluisant.

M. Carney, qui préside aussi le Conseil de stabilité financière, a brossé un tableau plutôt encourageant des efforts déployés pour renforcer le système financier et régler le problème posé par les banques jugées trop grosses pour faire faillite et qu'il a fallu sauver avec l'argent des contribuables.

Désormais, a-t-il assuré «ce sont les détenteurs d'obligations, les actionnaires et les dirigeants, plutôt que les contribuables, qui subiront le poids des pertes en raison du nouveau pouvoir de mise à contribution des investisseurs instauré dans tous les pays membres du G20».

Certains créanciers pourront ainsi être transformés en actionnaires afin de recapitaliser l'institution et répartir les pertes.

«Les créanciers privés devraient se plier à une plus grande discipline de marché, après s'être comportés comme des parasites à l'égard des contribuables.»

M. Carney a aussi évoqué la possibilité d'accords transfrontaliers en cas de faillite.

D'autres mesures pourraient être annoncées en septembre prochain, au cours du sommet de Saint-Pétersbourg.