La société montréalaise Fiera Capital unit sa destinée à Sceptre Investment Counsel (T.SZ), l'un des vieux noms de la gestion de capitaux en Ontario qui filait un mauvais coton depuis quelques années.

Le mariage donnera naissance à Fiera Sceptre, dont les actifs sous gestion totaliseront 30 milliards de dollars. La firme se rapprochera ainsi du top 10 des plus importants gestionnaires d'actifs au Canada. Au Québec, la nouvelle société se classera parmi les plus grands, derrière Jarislowsky Fraser, l'Industrielle Alliance et Addenda Capital.

Le président fondateur de Fiera Capital, Jean-Guy Desjardins, reluquait Sceptre depuis deux ans. «Nous avions identifié Sceptre comme une candidate quasi idéale pour un mariage, dit-il. J'ai communiqué avec le chef de la direction, Glenn Inamoto. On s'était entendu pour se fréquenter durant un certain temps.»

Or, M. Inamoto est mort. Et le conseil d'administration a passé en revue toutes ses options. Après avoir discuté avec plusieurs acheteurs potentiels, Sceptre a fixé son choix sur Fiera. Les deux firmes sont très complémentaires.

Quatre mariages et une entrée en Bourse

La mort de son dirigeant avait laissé un vide à la tête de Sceptre. De son côté, Fiera est dirigée par un entrepreneur aguerri: parti de zéro au début des années 70, M. Desjardins a fait de TAL Gestion globale d'actifs la plus importante société de gestion indépendante du Canada, avant de la vendre à la CIBC en 2001.

En 2003, il s'est engagé avec le Mouvement Desjardins, dont il a acquis la filiale de gestion pour fonder Fiera. En 2005, Fiera a fait une percée à Toronto, en achetant Senecal Investment Conseil. Quelques mois plus tard, elle s'est unie à YMG Gestion des capitaux, doublant ainsi sa taille.

Actuellement, Fiera Capital compte 22 milliards d'actifs sous gestion. Mais elle est beaucoup présente au Québec. Sa nouvelle conquête compte 7 milliards d'actifs, mais est plutôt orientée sur le reste du Canada.

«Nous avons une force de distribution et eux ont des produits que nous n'avons pas. Ce qui fait que notre force de distribution va avoir un portefeuille de véhicules financiers plus large qu'avant. Et eux vont avoir une équipe de distribution qu'ils n'avaient pas», explique M. Desjardins.

Dans le cadre de la transaction, les actionnaires de Sceptre obtiendront 14 millions d'actions de catégorie A de la nouvelle société. Les actions de Sceptre ont clôturé à 6,70$ hier, en hausse de 1,50$.

De son côté, Fiera échangera tout son actif et son passif contre 21,1 millions d'actions de catégorie B. Les actionnaires de Fiera détiendront 60% de la nouvelle Fiera Sceptre qui restera inscrite en Bourse.

Jean-Guy Desjardins restera actionnaire de contrôle. Le Mouvement Desjardins gardera sa position minoritaire. Et Jean Monty, ancien patron de BCE qui figure déjà parmi les partenaires financiers de Fiera, réinvestira 5 millions dans la nouvelle société.

La clôture de la transaction est prévue pour la fin de l'été. Après la fusion, les actionnaires de Sceptre recevront un paiement de 60 cents par action, soit 8,4 millions.

Au final, Fiera paiera entre 80 et 90 millions de dollars pour passer la bague au doigt de Sceptre. Il s'agit d'un prix raisonnable, selon un observateur qui préfère ne pas être nommé.

Cela représente environ 12 fois les bénéfices dégagés de Sceptre, qui ont atteint 6,7 millions au cours des 12 derniers mois (avant intérêts, impôts et amortissement). Le ratio est comparable à celui qui s'est appliqué lors de l'achat de la Financière Saxon en 2008.