En haussant sa taxe sur le capital et la masse salariale des institutions financières, tel qu'annoncé dans le budget de mardi, Québec compte recueillir plus de 100 millions par an en revenus fiscaux additionnels dans ce secteur.

Et en quatre ans de durée annoncée de cette hausse de taxes, la facture totale pour les institutions financières faisant affaires au Québec approchera le demi-milliard de dollars.

Mais dans le milieu financier, hier, au lendemain du budget, on se disait déjà prêt à digérer cette pilule fiscale dans le contexte des défis budgétaires de l'après-récession.

«Le milieu financier et les banques en particulier ont été très "vocal" envers le besoin de redresser les finances publiques. À cet égard, le dernier budget du Québec est courageux. Et c'est clair que, comme tout le monde, nous devons faire notre part», a indiqué Louis Vachon, président et chef de la direction de la Banque Nationale, en marge de son assemblée des actionnaires, qui avait lieu hier à Montréal.

«Les interventions financières des gouvernements depuis deux ans nous ont évité une dépression mondiale. Au Québec, elles ont amoindri la récession par rapport aux voisins. Mais là, il faut payer la facture avec un resserrement des politiques monétaires et fiscales.»

Selon M. Vachon, la hausse de «taxe compensatoire des institutions financières» qui a été annoncée mardi par Québec coûtera au moins 17 millions par an à la Banque Nationale.

Cette facture s'ajoutera aux quelque 247 millions que la Nationale dit payer annuellement en taxes et impôts divers au Québec, selon son plus récent «bilan social 2009» remis à ses actionnaires.

À la Banque de Montréal (BMO), qui prévoit payer 5 millions de plus par an en taxe provinciale, le principal patron au Québec, Jacques Ménard, a qualifié de «raisonnable» cette facture fiscale additionnelle pour le secteur financier.

«Nous avons une responsabilité comme agent économique, mais aussi comme citoyen. Le secteur financier fournit 1,3 milliard par an en taxes à Québec. Donner 100 millions de plus, c'est une hausse de 8% qui, dans les circonstances, me semble tout à fait appropriée», a indiqué M. Ménard.

Cette majoration de taxe aux institutions financières est promise comme «temporaire» jusqu'à 2014 par le ministre des Finances du Québec.

Seulement à la Banque Nationale, la facture fiscale additionnelle en quatre ans s'annonce à hauteur de 70 millions en tout.

Chez ses principaux concurrents, nommément le Mouvement Desjardins et la Banque Laurentienne, on préfère s'abstenir de commenter la mesure fiscale annoncée par Québec.

Néanmoins, une estimation calculée en fonction du coût déclaré par la Nationale et ses 14 200 employés au Québec permet d'évaluer la facture fiscale additionnelle de Desjardins autour de 30 millions par an. En quatre ans, la somme totale pourrait approcher les 120 millions.

À la Banque Laurentienne, qui déclare près de 4000 employés au Québec, la facture fiscale pourrait gonfler de 4 millions par an, ou quelque 16 millions d'ici 2014.

La taxe du Québec sur le capital et la masse salariale des institutions financières est dite «compensatoire» dans le jargon budgétaire parce qu'elle sert à compenser l'exemption de taxe de vente provinciale (TVQ) dont profitent la plupart des services financiers.

Dans son budget de mardi, le gouvernement du Québec a justifié la hausse temporaire de cette taxe en soutenant que les institutions financières auraient été «moins affectées par la récession» que les entreprises des autres secteurs.

Aussi, leur rentabilité serait déjà en redressement «substantiel», comme en faisaient foi leurs plus récents résultats trimestriels.

Avec la collaboration de Stéphanie Grammond