Le groupe israélien Teva, numéro un mondial des médicaments génériques, confronté à de sérieuses difficultés financières, a annoncé jeudi la suppression de 14 000 emplois dans le monde au cours des deux prochaines années, soit 25% de ses effectifs.

L'ancien fleuron de l'industrie israélienne, qui se débat depuis des mois avec les retombées de décisions managériales passées et des circonstances défavorables, a présenté jeudi un plan de restructuration douloureux devant lui permettre de faire 3 milliards de dollars d'économies d'ici à fin 2019.

«Ce plan est crucial pour restaurer notre sécurité financière et stabiliser nos affaires», dit le PDG du groupe Kare Schultz, dans une lettre aux employés publiée par la Bourse de Tel-Aviv.

Dans cette lettre, il souligne l'acuité de la situation pour un groupe dont la dette est chiffrée à 35 milliards de dollars. La priorité est de «maintenir la continuité de nos affaires et de mettre en oeuvre la restructuration», dit-il.

«Une stratégie à long terme viendra plus tard dans l'année. À court terme, nous devons nous concentrer sur la nécessité de générer de la trésorerie, assurer des revenus à court terme et le service de notre dette».

Teva va se séparer de 14 000 employés sur deux ans, sans tenir compte de l'impact que pourraient avoir de futures cessions d'unités du groupe. La majorité des licenciements est prévue en 2018, «tous les secteurs et toutes les régions (du monde) seront affectés», souligne le PDG dans son courrier.

Teva va fermer ou céder «un nombre significatif de sites de production aux États-Unis, en Europe, en Israël et sur les marchés de croissance». Les centres de recherche et développement, le siège et différents bureaux à travers le monde seront également touchés.

Grève annoncée

Le groupe n'a pas fourni de décompte par pays.

En Israël, le chef de la centrale syndicale Histadrout, Avi Nissenkorn, a rencontré la direction de Teva et affirmé que 1750 salariés allaient perdre leur emploi dans le pays (1250 en 2018, 500 en 2019).

L'un des sites de production israéliens doit être fermé, ce qui est «inacceptable», a-t-il dit, ajoutant que la centrale appelait à la grève dans tout le pays dimanche.

Cependant, Israël ne représente qu'un peu moins de 7000 salariés sur les 57 000 dans le monde, dont une large proportion en Europe et, dans une moindre mesure, aux États-Unis.

Teva a aussi annoncé la suspension des dividendes sur ses actions ordinaires et sur les certificats de dépôt (American depositary share, ADS, titres de créances), dans le cadre d'un «plan de restructuration complet destiné à réduire de manière significative ses coûts».

Teva ne versera pas non plus de bonus annuel en 2017, «les résultats financiers étant notablement inférieurs» aux prévisions pour l'année.

Teva se fixe pour objectif de réaliser d'ici à fin 2018 la moitié du plan d'économies de 3 milliards de dollars.

Le groupe avait déjà annoncé fin novembre réorganiser sa direction et ses structures. Il compte «optimiser son portefeuille de génériques à travers le monde, et plus particulièrement aux États-Unis», en ajustant ses prix et en mettant fin à la fabrication de certains produits.

«Management inconsidéré»

La chute des prix des génériques est l'une des causes, parmi d'autres, des ennuis de Teva.

Teva a en outre essuyé un rude coup début octobre avec la décision du régulateur américain des médicaments, la FDA, d'approuver la commercialisation d'une version générique du traitement vedette de Teva, le Copaxone, contre la sclérose en plaques.

L'activité de Teva est certes elle-même centrée sur les génériques, mais il détient parallèlement des marques propres, dont le Copaxone représente la moitié des ventes.

Teva continue à subir les conséquences de l'acquisition, largement considérée comme mal avisée, d'Actavis, la branche générique de l'américain Allergan, pour plusieurs dizaines de milliards de dollars.

Après des mois de flou à la tête du groupe, la nomination en septembre d'un nouveau PDG, le Danois Kare Schultz, avait été accueillie favorablement par les marchés, avec l'espoir de le voir redresser une entreprise qui représentait à elle seule plus de 1% du produit intérieur brut israélien.

En Israël, la restructuration a suscité l'émoi.

«Teva nous administre une douloureuse leçon d'ingratitude et de grossièreté», s'est ému le député travailliste Itzik Shmuli, «après  avoir bénéficié de milliards de réductions fiscales, ils licencient. La crise est réelle, et elle est surtout due à un management inconsidéré. Maintenant, ils veulent en faire payer le prix aux salariés».