Alors que l'action de SNC-Lavalin est sous pression au point de faire craindre une prise de contrôle étrangère, la Caisse de dépôt et placement du Québec s'active.

Depuis le printemps, la Caisse a acheté pour près d'un demi-milliard de dollars d'actions de la firme montréalaise d'ingénierie, dont 200 millions dans les trois dernières semaines. La participation du gestionnaire d'actifs dans SNC frôle maintenant la barre des 20 %, contre 14,9 % en mars.

Un document déposé cette semaine par la Caisse auprès des autorités boursières révèle que le plus important investisseur institutionnel de la province a acheté 252 000 actions de SNC durant la séance du 21 novembre, un bloc d'actions valant à lui seul une douzaine de millions de dollars.

Le document signale aussi que la Caisse a commencé le mois de décembre avec 34,9 millions d'actions de SNC, alors qu'elle en détenait 26,3 millions en début d'année.

La participation de la Caisse dans SNC, qui s'élevait à 12,3 % en mars 2017, a augmenté à 14,9 % en début d'année, puis à 17,5 % le mois dernier avant d'atteindre 19,9 % au 1er décembre.

DÉGRINGOLADE DU TITRE

La Caisse de dépôt - principal actionnaire de SNC - n'a pas souhaité expliquer son intervention dans le capital-actions de la plus grande firme de génie-conseil au pays. « Nous ne commentons pas les transactions effectuées au jour le jour sur les marchés financiers », a indiqué Maxime Chagnon, directeur des relations publiques à la Caisse de dépôt.

L'action de SNC a perdu environ le quart de sa valeur cette année. Le titre a notamment chuté d'environ 15 % le 10 octobre. 

Ce jour-là, l'entreprise a révélé que le Service des poursuites pénales du Canada ne négocierait pas d'accord de réparation relativement aux accusations de fraude et de corruption déposées il y a trois ans par la Gendarmerie royale du Canada pour des gestes faits en Libye.

Si SNC devait être reconnue coupable, l'entreprise pourrait ne plus avoir le droit de soumissionner pour des contrats gouvernementaux au pays pour un certain nombre d'années. Le recul boursier du 10 octobre radiait d'un coup l'équivalent en évaluation de toutes les activités liées à des contrats avec le gouvernement fédéral, avait commenté à La Presse le gestionnaire de portefeuille Charles Nadim, de Jarislowsky Fraser.

CRAINTES DES ANALYSTES

Le mois dernier, Maxim Sytchev, de la Financière Banque Nationale, avait souligné dans un rapport de recherche qu'un démantèlement de l'entreprise ou la fermeture de son capital devaient être considérés pour combler l'écart entre la valeur intrinsèque et le cours boursier.

Plus tôt cet automne, l'analyste Chris Murray, de la firme AltaCorp Capital, avait de son côté affirmé qu'une sous-évaluation soutenue de l'action « risqu[ait] de transformer SNC en cible d'acquisition avec toutes les ramifications politiques qui peuvent y être associées ».

La Presse a demandé à SNC-Lavalin si l'entreprise avait eu des discussions ou si une tierce partie avait pris contact avec elle récemment. La porte-parole Daniela Pizzuto a répondu que l'entreprise n'avait pas de commentaires à formuler.

Au cours boursier actuel, la participation de la Caisse de dépôt dans SNC-Lavalin vaut un peu plus de 1,6 milliard de dollars.

Évolution de la participation de la Caisse dans SNC-Lavalin

Au 1er janvier 2013 : 6,1 millions d'actions (% n.d.)

Au 18 mars 2014 : 15,5 millions d'actions ou 10,2 %

Au 16 mars 2015 : 17,2 millions d'actions ou 11,3 %

Au 14 mars 2016 : 18,5 millions d'actions ou 12,3 %

Au 13 mars 2017 : 18,5 millions d'actions ou 12,3 %

Au 12 mars 2018 : 26,3 millions d'actions ou 14,9 %

Au 21 novembre 2018 : 30,8 millions d'actions ou 17,6 %

Au 1er décembre 2018 : 34,9 millions d'actions ou 19,9 %