La réputation enviable de Montréal en intelligence artificielle n'est plus à faire. Une autre preuve : deux entreprises, la québécoise Coveo et le studio d'effets visuels américain Pixomondo, ont annoncé hier leur intention d'y offrir 400 nouveaux emplois en intelligence artificielle.

Pixomondo, qui a gagné un Oscar en 2012 pour son travail sur le film Hugo du réalisateur Martin Scorsese, veut faire de son nouveau studio montréalais son principal centre de recherche et développement (R et D) - notamment en raison de l'écosystème montréalais en intelligence artificielle. Pixomondo, qui emploie actuellement 700 personnes à travers le monde, compte créer un studio de 180 employés à Montréal d'ici trois ans. Ce studio, qui ouvrira au début de 2019, aura un double mandat : faire des contrats d'effets visuels traditionnels et faire de la R et D en effets visuels.

« Ça a plus de sens d'avoir un leader en R et D à Montréal. Avec la demande croissante pour du contenu, la R et D [et l'intelligence artificielle] seront un game changer pour l'industrie des effets visuels. Ce sera un objectif très important pour notre studio de Montréal. Les effets visuels traditionnels coûtent cher en raison des nombreuses heures de travail. Si on peut avoir des outils pour travailler plus rapidement et plus efficacement, on pourra réduire le coût », dit Perry Kain, producteur exécutif du studio de Pixomondo à Los Angeles, en entrevue avec La Presse.

Pixomondo, qui a aussi obtenu des mandats sur la série télé Game of Thrones et des films comme The Girl in the Spider's Web (de la série Millenium), estime que son studio de Montréal - le huitième du groupe américain - est appelé à devenir son deuxième studio en importance d'ici trois ans, après celui de Toronto (200 employés). 

« Nous avions plusieurs options pour établir ce studio, mais nous avons choisi Montréal avant Barcelone en raison de la qualité des travailleurs, des demandes des clients et de l'aide gouvernementale. » - Sara Mustafa, vice-présidente aux opérations globales de Pixomondo

Le premier mandat du studio montréalais de Pixomondo sera de réaliser des effets visuels pour Midway, un film de guerre qui a été tourné à Montréal cette année par le réalisateur Roland Emmerich (Independence Day, Godzilla).

Comme les autres studios d'effets visuels au Québec, Pixomondo bénéficiera d'un crédit d'impôt provincial de 36 % sur les salaires de ses employés. Pixomondo a aussi obtenu un crédit sans intérêt du gouvernement fédéral allant jusqu'à 750 000 $. Le Québec emploie actuellement un peu plus de 3000 personnes en effets visuels et en animation, et Montréal est l'une des cinq villes au monde les plus importantes dans cette industrie.

Pour expliquer la décision de Pixomondo de venir s'établir à Montréal, la mairesse Valérie Plante a souligné « le niveau de vie élevé » et le « dynamisme contagieux » de la métropole, ainsi que son « bassin de talents alimenté par les meilleurs établissements universitaires au monde ».

Le gouvernement Trudeau s'est aussi réjoui de l'arrivée de Pixomondo, qui renforcera la réputation de Montréal comme leader « dans les secteurs porteurs des effets visuels et de l'intelligence artificielle », a indiqué David Lametti, député libéral et secrétaire parlementaire au Développement économique. L'industrie des effets visuels et de l'animation connaît une « croissance annuelle de son volume d'affaires estimée à 27 % », indique Hubert Bolduc, PDG de l'organisme Montréal International.

225 NOUVEAUX EMPLOIS CHEZ COVEO

De son côté, Coveo, entreprise de Québec spécialisée dans l'intelligence artificielle, a dévoilé hier un projet d'agrandissement de son bureau de la gare Windsor afin d'y accueillir 225 nouveaux employés au cours des 12 prochains mois.

Dirigée par l'entrepreneur Louis Têtu, Coveo compte actuellement 75 employés à Montréal et 275 autres à Québec. Coveo a l'intention d'avoir 300 employés à Montréal en 2020.

L'entreprise entend ajouter 150 développeurs et scientifiques des données et de l'intelligence artificielle à son équipe de recherche et développement. Des postes en marketing et au service à la clientèle doivent aussi être pourvus.

« Bien que nous embauchions 225 nouveaux employés, nous créerons peu de nouveaux emplois dans l'économie locale puisque, depuis 10 ans, nous faisons face à une pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur des technologies au Canada », a indiqué Louis Têtu, chef de la direction de Coveo, par voie de communiqué.

« Forcément, Coveo devra débaucher des employés. Tout le monde travaille. » - Louis Têtu, PDG de l'entreprise Coveo

M. Têtu critique d'ailleurs ouvertement l'aide gouvernementale aux entreprises étrangères. Cela complique selon lui l'acquisition de talents pour les entreprises d'ici.

« Pourquoi payer des impôts pour payer un système d'éducation pour nos étudiants afin qu'ils travaillent pour une société étrangère alors qu'on a besoin d'eux ici ? », a-t-il demandé au cours d'un entretien.

Coveo, qui offre des solutions en intelligence artificielle à des entreprises clientes, souligne que ses revenus sont en progression de plus de 50% cette année.

« L'intelligence artificielle sera la transformation la plus brutale qu'on va connaître, affirme Louis Têtu. Il y aura deux catégories de compagnies dans l'avenir : celles qui adoptent l'intelligence artificielle et les autres qui les concurrenceront. »

Photo Edouard Plante-Fréchette, Archives La Presse

Louis Têtu, PDG de l'entreprise Coveo, spécialisée en intelligence artificielle