Le Québec réussit de mieux en mieux à garder ses travailleurs et aussi les immigrants qu'il accueille chaque année. Depuis trois ans, l'écart entre le nombre de personnes qui s'installent au Québec et celles qui le quittent vers d'autres provinces a presque diminué de moitié.

Le phénomène coïncide avec le resserrement du marché du travail, analyse Hélène Bégin, l'économiste principale de Desjardins qui s'est penchée sur le solde migratoire du Québec. « II y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte, mais en général, les gens se déplacent en fonction du taux de chômage », explique-t-elle lors d'un entretien avec La Presse.

Qu'ils viennent d'ailleurs ou qu'ils soient nés au Québec, les travailleurs qui ont entre 25 et 64 ans ont de moins en moins de raisons d'aller voir ailleurs.

L'écart entre le taux de chômage des immigrants et celui de la population née au Québec s'est rétréci. Le taux d'emploi des immigrants, soit la proportion des immigrants de 25 à 54 ans qui travaillent, était de 77,8 %, soit à peu près le même qu'en Ontario (78,4 %).

Avec l'étranger, le solde migratoire du Québec est largement positif depuis une quinzaine d'années, souligne l'économiste de Desjardins. Et ces immigrants restent de plus en plus au Québec. Cinq ans après leur arrivée, 84,3 % y sont encore, un taux de rétention qui ira en augmentant avec l'amélioration du marché du travail, prévoit-elle.

« Ça fait un bout de temps que les régions sont en concurrence pour recruter des immigrants et on est maintenant rendus au stade d'essayer de les garder. Et il semble qu'on réussit de mieux en mieux », constate Hélène Bégin.

D'AUTRES FACTEURS

La main-d'oeuvre québécoise, immigrante ou non, a aussi moins tendance à partir vers d'autres provinces, surtout vers l'Ontario, pour améliorer son sort. De ce côté, le solde migratoire du Québec a pratiquement toujours été déficitaire. Mais ce déficit se résorbe : il était de 11 000 personnes en 2017, presque deux fois moins qu'il y a trois ans.

« Le manque d'emplois disponibles dans certains secteurs incitait une partie de la main-d'oeuvre à se déplacer dans la province voisine. Cette époque est révolue, le taux de chômage des deux provinces est désormais semblable et avoisine 5,5 %. »

Ce sont surtout les 25 à 64 ans qui quittent la province et, en plus du marché du travail, d'autres facteurs peuvent influer sur leur décision. Le taux d'imposition, l'accès aux garderies et les programmes sociaux pèsent aussi dans la balance, souligne l'économiste de Desjardins. « Le coût de la vie, et surtout le prix des maisons, est aussi un facteur important. La maison de 300 000 $ au Québec peut coûter 1 million en Ontario », illustre-t-elle.

Le déficit migratoire avec l'Ontario devrait continuer à se résorber, avec un taux de chômage au Québec comparable à celui de l'Ontario et le vieillissement accéléré de la population du Québec.

« C'est une excellente nouvelle, mais ça reste insuffisant pour pourvoir les emplois disponibles actuellement dans le secteur privé », dit Hélène Bégin. D'autres mesures, comme la rétention des travailleurs âgés et des horaires de travail flexibles, sont nécessaires pour combler le déficit de main-d'oeuvre.

Le nombre de postes à pourvoir dans les entreprises du Québec a grimpé en flèche depuis deux ans. Il y aurait actuellement 109 600 emplois disponibles, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.