Le ministère du Travail a confirmé, mercredi, qu'il augmenterait le salaire minimum plus que prévu, le 1er mai prochain, vu l'embellie économique. Le salaire minimum passera ainsi de 11,25 $ à 12 $ l'heure.

Lorsqu'il avait augmenté le salaire minimum, le 1er mai dernier, Québec avait indiqué la tendance qu'il voulait suivre à plus long terme. Il voulait ainsi veiller à ce que le salaire horaire minimum atteigne en bout de course 50 % du salaire horaire moyen. Et comme ce salaire moyen a grimpé plus que prévu, vu la bonne santé de l'économie, le salaire minimum grimpera plus que prévu.

Cette hausse profitera à 352 900 travailleurs, principalement des femmes, a souligné le ministère dans son communiqué.

Mais même à 12 $ en mai prochain, le Québec sera toujours loin derrière l'Ontario et l'Alberta. La province voisine du Québec l'a haussé à 14 $ le 1er janvier dernier et a déjà annoncé qu'elle le hausserait à 15 $ le 1er janvier prochain. Et l'Alberta le haussera à 15 $ le 1er octobre prochain.

Travailleurs

«C'est une bonne nouvelle, mais il aurait pu faire mieux», particulièrement dans un contexte de plein emploi, a commenté au cours d'une entrevue le président de la FTQ, Daniel Boyer.

C'est d'ailleurs la FTQ qui a lancé le bal de la lutte pour le salaire minimum à 15 $, le 1er mai 2016, elle qui représente plus de 600 000 travailleurs au Québec. Ensuite, une coalition s'est formée et le mouvement a été lancé.

M. Boyer rappelle d'ailleurs qu'un écart de 3 $ l'heure demeurera face à l'Ontario et l'Alberta. «Il faut aller plus vite que ça», s'exclame-t-il.

Il admet que cela peut avoir des répercussions sur certaines entreprises, «quelques petites secousses», mais rappelle que cela aurait aussi des bienfaits pour l'économie, puisque les travailleurs qui bénéficieraient de l'augmentation consommeraient davantage.

«Les scénarios catastrophes (annoncés par certains) ne se sont produits nulle part», a-t-il affirmé.

Du côté de la Coalition 5-10-15, la co-porte-parole, Virginie Larivière, y a vu une bonne et une mauvaise nouvelle à la fois. Elle se dit déçue parce qu'il y a pénurie de main-d'oeuvre et que cela aurait été l'occasion de le hausser davantage, mais tout de même contente que ce soit plus que ce qui était attendu.

Employeurs

Mais les PME se disent inquiètes. «C'est un peu inattendu. On aurait préféré que le gouvernement suive son plan de match initial», a estimé au cours d'une entrevue Martine Hébert, vice-présidente principale de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Elle indique que cette hausse de salaire pour les plus bas salariés au sein d'une entreprise aura un effet d'entraînement sur les autres employés - ceux qui touchent 15 $, par exemple - qui voudront à leur tour avoir plus. «Le salaire minimum a un effet domino dans les entreprises. Ça crée une pression à la hausse sur l'ensemble de la masse salariale, et non pas juste sur les travailleurs qui sont au salaire minimum», a opiné Mme Hébert.

Quant à savoir si les PME vont tenter de rogner sur les autres avantages de leurs employés pour compenser la hausse de leurs coûts de main-d'oeuvre, Mme Hébert indique que «les employeurs s'ajustent comme ils peuvent». Dans certains cas, il peut s'agir d'une hausse de prix, dans d'autres d'une diminution du nombre d'heures de travail, dans d'autres le fait de retarder des embauches de travailleurs, a-t-elle illustré.

Au Conseil du patronat aussi, on sourcille. Son président-directeur général, Yves-Thomas Dorval, a souligné que la hausse de 75 cents représentait une hausse de 6,7 %. «Les entreprises dont les marges de profits sont très minces auront plus de difficulté à l'absorber», a-t-il affirmé.