Le président sortant de l'Association québécoise des lobbyistes (AQL), Mathieu Santerre, appelle ses membres à réfléchir aux limites qui pourraient être apportées à leurs activités partisanes.

Dans une lettre aux membres de l'Association que La Presse Canadienne a obtenue, M. Santerre fait valoir que «le cumul de la fonction de lobbyiste et de certaines activités partisanes peut susciter un malaise auprès de titulaires de charges publiques et du public».

Mathieu Santerre annonce du même coup qu'il sollicitera un renouvellement de son mandat lors de l'assemblée générale du 2 juin prochain et place cette question parmi les trois priorités sur lesquelles il entend se concentrer.

«Si on clarifiait certaines choses à propos du lobbyisme, comme la question de l'implication partisane, je crois que tous les lobbyistes y gagneraient et cela aiderait à contrer cette image négative que les gens ont du lobbyisme», a-t-il expliqué en entrevue.

Sans promouvoir l'adoption de normes similaires à celle que l'on retrouve au niveau fédéral, il estime tout de même qu'il serait possible de s'inspirer des directives de la commissaire fédérale au lobbying entourant la Règle 9 du Code de déontologie des lobbyistes, qui vise les activités politiques des lobbyistes au niveau fédéral.

Celle-ci prévoit qu'un lobbyiste peut se livrer à certaines activités partisanes telles que de voter, poser des pancartes pour un candidat, participer à une activité de financement ou même contribuer au financement d'une campagne électorale dans le respect de la loi.

En contrepartie, elle note qu'il y a un risque de conflit d'intérêt lorsqu'un lobbyiste siège à une instance de l'association de comté d'un candidat, qu'il occupe quelque rôle que ce soit dans la campagne électorale d'un candidat ou s'occupe du financement de celle-ci.

Outre la réflexion sur l'activité partisane, Mathieu Santerre entend se concentrer sur deux autres priorités.

Ainsi, il souhaite également réclamer le retrait pur et simple du projet de loi 56 qui impose de multiples obligations administratives non seulement aux organismes commerciaux qui font des représentations auprès des titulaires de charges publiques, mais aussi aux organismes sans but lucratif, qui seraient désormais eux aussi inscrits au registre des lobbyistes.

M. Santerre fait valoir que le projet de loi 56 a réussi à faire l'unanimité contre lui en raison de la lourdeur administrative qu'il impose inutilement à tous les intervenants concernés.

«Ce projet de loi, sous le couvert d'objectifs qui sont nobles et que l'on reconnaît, comme la transparence et l'équité notamment, va avoir des effets pervers plus importants que ce qu'il souhaite corriger», dit-il.

Il note que, pour les lobbyistes commerciaux, le gouvernement dit une chose et fait le contraire avec ce projet de loi.

«Le gouvernement se targue de simplifier la vie des entrepreneurs, mais ce serait un contre-message très important que d'adopter ce projet de loi puisqu'il alourdit considérablement et inutilement leur fardeau administratif.»

Quant aux organismes sans but lucratif, il rappelle que plusieurs d'entre eux peinent à survivre financièrement.

«Ils craignent que ce soit tellement compliqué de faire des contacts auprès des titulaires de charge publique, que ça coûte cher en temps, en ressources financières pour être conformes et que finalement ça décourage certains contacts qui sont par ailleurs légitimes.»

Il place donc comme troisième priorité la mise à jour de la loi actuelle par voie réglementaire, une modernisation qui viserait la simplification et qui permettrait d'inscrire les organismes à but non lucratif au registre afin d'atteindre les mêmes objectifs de transparence et d'équité en matière de représentation auprès de détenteurs de charges publiques.

«On a déjà une loi, qui est parfois trop complexe à appliquer et qui est parfois trop tatillonne, mais franchement, ce n'est rien à côté du projet de loi 56», soupire-t-il à l'autre bout du téléphone.

«On serait aussi bien de mettre à jour l'encadrement du lobbyisme par les dispositions réglementaires que nous permet la loi actuelle pour obtenir quelque chose de plus viable.»

Le choix du prochain président de l'AQL aura lieu lors de l'assemblée générale de l'organisme le 2 juin prochain. Il a toutefois été impossible de savoir si d'autres candidats entendent se manifester.