Un peu d'oxygène pour les parents qui ont des enfants en garderie subventionnée, le devancement de la réduction de la « taxe santé » et davantage d'argent pour en finir avec les écoles vétustes : le troisième budget Leitao, déposé jeudi à l'Assemblée nationale, distribue avec parcimonie sa marge de manoeuvre au gré des controverses récentes.

En tout, 469 millions sont répartis dans une série de mesures. Les plus importantes : 164 millions pour favoriser la réussite scolaire, 130 millions pour devancer dès 2016 la réduction de la taxe santé, 130 millions pour un programme de rénovation domiciliaire « écoresponsable ». Le développement économique récupère 345 millions dans une longue liste de mesures touchant l'informatique, la forêt, le tourisme et l'économie sans carbone.

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Mais la décision la plus importante du budget reste l'injection de 2 milliards au Fonds des générations pour réduire la dette publique, quatre fois plus que l'ensemble des mesures du budget. La dette atteindra tout de même 217 milliards et elle représente toujours 55 % du produit intérieur brut (PIB). L'an prochain, on consacrera une autre somme de 2,5 milliards à la dette. La décision surprend : le premier ministre Couillard s'était engagé à retourner les surplus à parts égales aux baisses d'impôts et à la réduction de la dette.

Jeudi, le ministre Leitao n'a pas laissé de doute : Québec continuera de s'attaquer à la dette en priorité. 

À mi-mandat, le gouvernement est loin de son objectif de créer 250 000 emplois ; on est à 81 700 depuis le printemps 2014. 

« Nous avons remis la maison en ordre, établi des bases solides constituant le socle de notre prospérité », estime Carlos Leitao.

Comme prévu, le budget garde le cap du déficit zéro. S'il ne contient aucune hausse de taxes ou d'impôts, des allègements modestes sont prévus pour les contribuables. Les revenus du gouvernement vont augmenter de 2,6 %, à 82 milliards, cette année. Mais Québec empoche 1 milliard de plus en transferts fédéraux, rendus à 20 milliards, en hausse de 5,7 %.

Austérité ou non ?

Pour le critique péquiste aux Finances, Nicolas Marceau, ce budget illustre la stagnation de l'économie. « Il ne s'est pas créé d'emplois depuis dix mois. On a 250 pages de mesures économiques, mais on prévoit que l'augmentation des investissements du secteur privé est de zéro », a-t-il lancé. « Vous ne trouverez dans ce budget aucune mention de l'engagement de 250 000 emplois. On est passé d'une promesse à une cible, à un mythe. L'engagement est porté disparu ! », d'ironiser M. Marceau. 

Pour la Coalition avenir Québec, le budget « est un échec économique annoncé, a dit son chef François Legault. La croissance économique est très faible, comparé à l'Ontario. Le gouvernement tolère une économie qui traîne de la patte, qui dépend de plus en plus des transferts fédéraux ».

En fait, l'austérité se prolonge à Québec : la croissance des dépenses de programmes sera limitée à 2,7 % en 2016 et ne bougera guère jusqu'en 2021. L'année dernière, la croissance des dépenses avait été cassée à 1,7 %. Québec atteint ses cibles pour une deuxième année quant au contrôle des dépenses, une première en 23 ans, a relevé le président du Conseil du trésor, Sam Hamad.

Carlos Leitao s'insurge quand on parle d'austérité. 

« Si vous voulez voir ce qu'est l'austérité, attendez les budgets qui seront déposés dans les autres provinces, à Terre-Neuve notamment. En Ontario, la croissance des dépenses est limitée à 1 % », affirme Carlos Leitao.

Au Québec, on a donné « un coup de frein » à la croissance des dépenses.

La santé se contentera d'une augmentation de 2,4 % ; le plus gros des 475 millions de hausse ira à l'augmentation des salaires. 

D'autres mesures

L'éducation paraît favorisée avec une hausse de 3,0 % de son budget (environ 500 millions de plus). Il s'agit d'une hausse modeste si on considère la croissance moyenne de 3,2 % de ce budget sur les 10 dernières années. Pour faire cesser la controverse autour des écoles vétustes, Québec injecte 200 millions supplémentaires pour les immobilisations en éducation cette année ; 600 millions sur trois ans.

Québec devance et raccourcit la période prévue pour l'abolition de la taxe santé. On débute dès 2016, un an plus tôt que prévu, un gain qui se matérialisera quand on remplira sa déclaration de revenus au printemps 2017. La contribution santé sera complètement abolie en 2018, l'année où le gouvernement se présentera aux élections. 

Les parents qui ont des enfants en service de garde subventionné auront un peu d'oxygène pour faire face à la hausse des tarifs, qui se répercute dans leur déclaration de revenus. Québec accorde une réduction de 50 % pour la hausse de tarif visant le deuxième enfant, une mesure rétroactive au 1er janvier 2015.

Québec donne aussi un crédit d'impôt de 4000 $ pour les salariés qui continuent de travailler au-delà de 64 ans ; ce sera 63 ans l'an prochain et 62 ans en 2018. Un travailleur bénéficiera alors d'une réduction d'impôt de 602 $.

Le plan du rapport Godbout de hausser la taxe de vente pour baisser les impôts est remis aux calendes grecques. La proposition n'a pas suscité l'approbation attendue, de reconnaître le ministre Leitao qui favorisait cette avenue encore l'automne dernier.