En marge de la conférence de presse, le grand patron de la Caisse de dépôt, Michael Sabia, a fait part de sa lecture de l'économie québécoise et a expliqué le rôle qu'entend jouer la Caisse à l'égard de fleurons comme SNC-Lavalin. Il a aussi parlé des orientations à venir au sujet des énergies fossiles.

Vous avez parlé longuement des marchés internationaux pendant la conférence de presse. Quelle est votre lecture de l'économie du Québec ?

Notre lecture n'est pas très différente de celle du Canada. Le Québec a un enjeu d'investissement, qui résulte de la baisse importante du prix des matières premières. Le Québec, comme le Canada d'ailleurs, a aussi un enjeu de compétitivité parce que les coûts unitaires progressent plus fortement chez nous qu'aux États-Unis ou qu'au Mexique. Pour y faire face, nous avons besoin d'investissements en infrastructures, en éducation, en formation et en entrepreneuriat.

Quelle est votre stratégie à l'égard des entreprises québécoises comme SNC-Lavalin qui sont vulnérables à une prise de contrôle par l'étranger ou par des fonds activistes ?

Pas facile d'élaborer une règle générale, car chaque cas est différent. La clé, c'est la performance. Si une société est hautement performante, ça diminue les probabilités d'une offre hostile. Il faut mettre l'accent sur l'offensive. Il faut penser au développement de nouvelles sociétés. Il faut penser aux acquisitions possibles par SNC-Lavalin, ou encore le cas de WSP, une société qui a fait trois, quatre ou cinq acquisitions importantes dans les cinq dernières années. Cette société est en train de jouer à l'offensive. C'est la seule façon dans le monde actuel de gagner.

Vous avez dit que vous vouliez avoir investi d'ici 2019 un tiers de votre portefeuille global dans des titres sensibles à l'inflation ; actuellement, vous êtes à 28 %. Une fois cet objectif atteint, serez-vous un précurseur dans l'univers des grandes caisses de retraite ou ne ferez-vous que suivre le courant ?

La Caisse a sous-investi dans les catégories d'actifs moins liquides : immeubles, infrastructures et placements privés. Nous avons un peu de travail à faire pour bâtir nos positions. C'est la raison pour laquelle nous avons établi une cible. Plusieurs de nos pairs sont déjà arrivés entre 30 et 35 %.

Que répondez-vous au mouvement écologiste qui réclame que les investisseurs institutionnels comme la Caisse de dépôt se retirent du secteur des énergies fossiles ?

La question des changements climatiques est primordiale. On a plusieurs façons d'y répondre, et ce n'est pas toujours en s'interdisant de faire les choses. Selon nous, il existe une façon positive de faire les choses. Nous sommes déjà un investisseur très important dans les technologies et les énergies propres. La Caisse projette de nouveaux investissements pour encourager, par exemple, l'énergie propre dans le domaine de l'électrification des transports.

Également, il y a un rôle de travailler avec les sociétés dans un, deux, trois secteurs pour encourager une amélioration de leur performance climatique. Nous sommes en train de réexaminer toutes nos politiques et notre positionnement par rapport à cette question. Nous allons, dans un proche avenir, présenter quelques nouvelles orientations pour mieux positionner la Caisse face à cet enjeu.

En immobilier, vous avez encore souligné le travail remarquable de Daniel Fournier à la tête de votre filiale Ivanhoé Cambridge, comme vous le faites chaque année. Pourtant, le portefeuille immobilier n'atteint pas l'indice de référence depuis plusieurs années. À quoi sert l'indice de référence en immobilier ?

L'indice en immobilier n'est pas une chose très importante, selon nous. Quand on considère la performance de toute l'industrie immobilière, notre indice de référence se positionne toujours dans le premier décile de performance. C'est hautement élevé. Est-ce raisonnable d'avoir un indice à ce point élevé ? Notre objectif n'est pas d'encourager nos gens à battre un indice extrêmement exigeant, mais de conclure de bonnes transactions, de faire des investissements qui vont nous payer un dividende à long terme. C'est la raison pour laquelle nous croyons qu'Ivanhoé Cambridge a réalisé depuis quatre ou cinq ans une performance exceptionnelle.

Photo Alain Roberge, La Presse

« Le Québec, comme le Canada d’ailleurs, a aussi un enjeu de compétitivité parce que les coûts unitaires progressent plus fortement chez nous qu’aux États-Unis ou qu’au Mexique », dit Michael Sabia, grand patron de la Caisse de dépôt et placement du Québec.