Environ 6500 puits pourraient être forés dans l'île d'Anticosti sur une période de 75 ans, selon un scénario élaboré par Québec dans le cadre d'une consultation publique.

Le gouvernement Couillard a organisé des consultations dans l'île, ces derniers jours, afin de recueillir les impressions des riverains sur l'industrie pétrolière. On leur a présenté deux scénarios de développement, colligés à partir des connaissances géologiques et des projections de l'industrie.

Le «scénario plus», le plus ambitieux, prévoit le forage 6500 puits sur 35% à 40% du territoire de l'île, essentiellement dans la portion sud. L'extraction débuterait en 2020 et se terminerait en 2095. On produirait du pétrole et du gaz de schiste.

Jusqu'à 385 plateformes comptant chacune de 5 à 10 puits seraient actives en même temps pendant le pic de production, autour de 2045. C'est donc dire qu'entre 1900 et 3800 puits pourraient être en activité simultanément.

La production de l'île d'Anticosti serait beaucoup moins importante que celle du Dakota-du-Nord, le principal producteur de pétrole de schiste aux États-Unis. Selon des données publiées par cet État, on comptait 9419 puits en production dans la formation géologique de Bakken au mois de mars.

Selon le «scénario moins», plus prudent, la production pétrolière d'Anticosti s'échelonnerait sur 56 ans. On forerait pendant cette période 3900 puits, répartis sur de 25 à 30% du territoire.

Les écologistes s'expliquent mal pourquoi les documents de consultation et les scénarios n'ont pas été rendus publics plus tôt. Patrick Bonin, porte-parole de Greenpeace, soupçonne le gouvernement libéral de chercher à approuver en catimini l'industrie dans l'île d'Anticosti.

«On voit clairement que le gouvernement avance avec l'intention d'exploiter, qui a été affirmée à plusieurs reprises, et ça, c'est une étape de plus, a dit M. Bonin. On voit que la machine avance alors que les gens ne sont pas au courant des enjeux.»

Selon lui, une production pétrolière d'une telle ampleur provoquerait une hausse marquée des émissions de gaz à effet de serre du Québec, qui se présente pourtant comme un leader dans la lutte contre les changements climatiques.

Hypothétique

Au cabinet du ministre des Ressources naturelles, Pierre Arcand, on assure que les projections présentées aux citoyens d'Anticosti sont «hypothétiques» et servent à amorcer les travaux de l'Étude environnementale stratégique sur le développement de cette filière.

«Pour les scénarios hypothétiques, c'est comme une photo, a résumé la porte-parole du ministre, Véronique Normandin. On a réconcilié des données des géologues et des données de l'industrie. C'est à partir de cela que des scénarios hypothétiques ont été construits.»

Le gouvernement Couillard a lancé deux évaluations environnementales stratégiques, l'an dernier. La première porte sur l'ensemble du secteur des hydrocarbures, incluant le pétrole et le gaz de schiste. La seconde porte plus spécifiquement sur l'île d'Anticosti.

Aucune décision ne sera prise sur le développement pétrolier de l'île avant la fin de cette dernière étude.

«Nous allons informer la population à toutes les étapes et pas seulement à la fin des travaux», a assuré Mme Normandin.

Pour l'heure, le potentiel pétrolier d'Anticosti reste incertain. Des sondages stratigraphiques ont débuté l'an dernier. En raison d'un retard, ils ne se termineront que cette année.

Une fois les résultats de cet exercice connu, on procèdera à trois forages par fracturation pour chercher des hydrocarbures. Cette étape, qui aura lieu l'an prochain, vise à valider le potentiel économique du pétrole.

Les scénarios élaborés

SCÉNARIO «PLUS»



• Début de la production: 2020

• Fin de la production: 2095

• Nombre total de puits: 6500

• Superficie de l'île exploitée: 35 à 40%

SCÉNARIO «MOINS»



• Début de la production: 2020

• Fin de la production: 2076

• Nombre total de puits: 3900

• Superficie de l'île exploitée: 25 à 30%