Quand la croissance et les rentrées fiscales sont moins fortes que prévu, rien ne vaut un alourdissement du fardeau fiscal pour maintenir la cible du solde budgétaire.

Le ministre des Finances Carlos Leitao a vite fait ses classes politiques. Il a annoncé hier des mesures fiscales exerçant une ponction fiscale de 122 millions pour l'exercice en cours dans ce qui devait être seulement une mise à jour de son budget présenté le 4 juin. L'objectif vise à limiter le déficit à 2,35 milliards, tel qu'annoncé en juin.

Pour l'ensemble de 2015-2016, la ponction fiscale annoncée s'établit à 600 millions.

Même si le ministre se réjouit que l'économie prenne du mieux après son expansion anémique de 1,0 % en 2013, il abaisse sa prévision du produit intérieur brut (PIB) réel pour 2014 et 2015. L'expansion est revue à 1,6 % en 2014 (c'était 1,8 % en juin) et à 1,9 % (2,0 %) l'an prochain.

L'assiette fiscale, évaluée à l'aune du PIB nominal (mesuré en dollars d'aujourd'hui), grossit moins vite aussi : 3,1 % au lieu de 3,4 % cette année et 3,8 % au lieu de 3,9 % l'an prochain.

Cela rend plus compliquée la quête du déficit zéro, bien que cela reste possible.

À preuve, la croissance des PIB réel et nominal en 2013, année où le Parti québécois était aux commandes de l'État, a été plus faible encore que ce qu'on croyait en juin. M. Leitao n'avait pas hésité à porter de 2,5 à 3,1 milliards le déficit pour 2013-2014 lorsqu'il a succédé à Nicolas Marceau en ajoutant que la croissance des dépenses avait été beaucoup plus élevée que prévu.

Or, les données réelles des comptes publics publiées plus tôt hier font état d'une croissance un peu plus faible des dépenses et d'un déficit contenu à un peu plus de 2,8 milliards.

Quelque 300 millions de moins dans le rouge que prévu, voilà une bonne nouvelle pour le Québec, mais qui mettra davantage de pression sur le gouvernement pour réaliser son ambitieux objectif, car la variation des prévisions s'inverse.

Ainsi en juin, M. Leitao avait prévu une augmentation de 1,8 % des dépenses de programmes pour l'année en cours. Il la voit maintenant à 2,1 %. L'objectif de la contenir à 0,7 % en 2015-2016, année de l'équilibre budgétaire, est néanmoins maintenu, même s'il reste encore 1,2 milliard de coupes à identifier.

Dans la colonne de gauche des états financiers, le ministre comptait en juin sur une croissance de 4,7 % de ses revenus. Il mise désormais sur 4,0 %, compte tenu de l'apport plus faible de l'impôt des particuliers (197 millions en moins), des cotisations pour services de santé (- 62 millions) et des taxes à la consommation (- 60 millions).

Ces rentrées fiscales moins élevées reflètent sans doute que l'économie québécoise ne crée pas d'emplois depuis le début de l'année.

Mince consolation, l'impôt des sociétés, un vrai cauchemar pour M. Marceau, devrait rapporter 82 millions de plus que prévu.

Évidemment, M. Leitao a été favorisé par la baisse des taux d'intérêt, ce qui a allégé le service de la dette qui s'élève néanmoins à 10,6 milliards sur des revenus autonomes d'un peu plus de 72 milliards. De cette somme, 3,2 milliards sont des intérêts sur le passif des régimes de retraite des employés des secteurs public et parapublic.

Il serait hasardeux de compter à nouveau sur une baisse accrue des taux obligataires l'an prochain quand ils sont déjà près de leurs creux historiques. Une hausse modérée pourrait diminuer en revanche les intérêts pour les régimes de retraite.

Québec maintient que le ratio de la dette brute (206,1 milliards) sur la taille de l'économie plafonnera à 55,1 % l'an prochain.

En revanche, il prévoit que le ratio diminuera moins vite par la suite. En juin, il voyait le ratio descendre à 50 % en 2019. Désormais, quand la dette aura atteint 217,9 milliards, elle correspondra à 50,7 % du PIB nominal.

Cela reflète avant tout que la taille de l'économie grossit moins vite que n'augmente un tel fardeau.

C'est un ratio qu'auront à l'oeil les agences de notation.