À compter du 1er janvier, les détaillants d'essence devront acheter des crédits de carbone et ils feront payer la facture aux automobilistes québécois, qui paient déjà le plus cher au Canada pour faire le plein, a confirmé hier le gouvernement Couillard dans sa mise à jour économique.

Au prix actuel des crédits de carbone, soit autour de 12%, ça signifie une augmentation d'au moins 2 cents le litre d'essence au début de 2015. Le prix de l'essence continuera d'augmenter avec le prix des crédits de carbone, fixé par un marché auquel le Québec et la Californie sont les seuls participants en Amérique du Nord.

L'impact sur les automobilistes sera modeste, estime le ministre de l'Environnement, David Heurtel.

«Pour un automobiliste qui a une voiture qui consomme 7 litres aux 100 kilomètres et qui parcourt 20 000 kilomètres par année, on parle d'une augmentation d'à peu près 28$ par année, a-t-il illustré. C'est moins qu'un café par semaine.»

La baisse récente du prix du pétrole et de l'essence a donné au gouvernement l'occasion idéale d'augmenter les prix à la pompe sans faire trop de tort à l'économie québécoise.

Droits de polluer

Avec l'intégration des distributeurs de carburant au marché du carbone, les entreprises à l'origine de 85% des émissions de gaz à effet de serre devront désormais acquérir des droits de polluer.

La stratégie du marché du carbone forcera ces entreprises à innover pour réduire leur utilisation de carburants fossiles, estime le ministre Heurtel.

«On a un impératif planétaire de mettre un prix sur le carbone, a-t-il plaidé. Notre survie en dépend, tous les experts, toute la science le dit.»

Ce changement prévu et déjà dénoncé n'a pas surpris les détaillants d'essence. Mais jusqu'au dernier moment, ils ont espéré que le gouvernement reporte leur obligation de participer au système de plafonnement et d'échange des droits d'émissions parce que la croissance économique bat de l'aile, a commenté hier Carol Montreuil, porte-parole de l'Association canadienne des carburants.

Les prix du diesel, du mazout, du gaz naturel et du gaz propane devraient augmenter de la même façon avec le prix des crédits de carbone.

Pour préserver la compétitivité des entreprises, le gouvernement libéral a prévu une déduction additionnelle pour les coûts de transport. Les PME manufacturières auront droit à une déduction de leurs coûts de transport qui variera de 1% du revenu brut pour celles qui sont situées à Montréal (maximum de 50 000$) jusqu'à 5% du revenu brut pour celles qui sont situées en régions éloignées (maximum de 350 000$). Une déduction maximale de 7% du revenu brut, sans plafond, est prévue pour les PME manufacturières situées en régions isolées, comme Anticosti.

Québec annonce aussi des investissements additionnels de 200 millions d'ici 2020 dans l'électrification des transports et le développement de technologies vertes. Le détail des mesures sera dévoilé plus tard.

Assurance et immatriculation

Les particuliers, pour leur part, paieront plus pour rouler en voiture, en moto ou en véhicule récréatif, sans déduction possible. En plus de l'augmentation du prix de l'essence, ils paieront plus cher pour la portion assurance de dommages payée à la Société de l'assurance automobile du Québec, dont le taux de taxe passe de 5 à 9%. Pour un véhicule dit de promenade, ça signifie 20$ de plus par an.

En outre, les droits d'immatriculation augmenteront pour les grosses cylindrées à compter du 1er janvier 2016.

Sans surprise, ces mesures ont été bien accueillies par Transit, l'Alliance pour le financement des transports collectifs au Québec. Les sommes provenant de la vente de crédits carbone pourraient permettre des améliorations aux transports collectifs, qui en ont «cruellement besoin», a commenté Coralie Deny, directrice générale du Conseil régional de l'environnement de Montréal, un membre de l'Alliance.