Le ministère des Finances du Canada reconnaît qu'au Québec, la portion fédérale de l'impôt sur les dividendes ne respecte pas un principe fondamental de la fiscalité. Toutefois, il ne manifeste aucunement l'intention de corriger la situation et juge que c'est au Québec de réagir en réduisant ses impôts.

Hier, La Presse faisait état d'une étude selon laquelle 650 000 Québécois sont indûment surimposés au fédéral d'une somme avoisinant les 200 millions. La trouvaille du Centre québécois de formation en fiscalité (CQFF) concerne l'impôt sur les dividendes.

À Ottawa, la réaction du ministère des Finances au reportage de La Presse est venue hier après-midi par courriel. Essentiellement, l'explication technique du Ministère suggère que c'est au gouvernement du Québec de réduire ses impôts sur les dividendes, d'une proportion qu'on estime entre 6 et 18%. À Québec, le ministre des Finances, Nicolas Marceau, dit avoir demandé à son équipe de faire des vérifications.

L'analyse du CQFF fait ressortir que le fédéral bafoue un principe fondamental de la fiscalité des dividendes pour les contribuables du Québec, appelé le principe d'intégration.

En vertu de ce principe, le taux d'imposition des dividendes versés par les entreprises aux particuliers doit être ajusté pour faire en sorte qu'ultimement, il soit équivalent au taux d'imposition d'un salaire, par exemple. L'ajustement est atteint au moyen d'un crédit d'impôt pour dividendes (CID), entre autres.

Une raison bien simple explique cet ajustement: les dividendes versés aux particuliers-actionnaires proviennent de fonds qui ont déjà été imposés au sein de l'entreprise (impôt sur les bénéfices), tandis que les salaires sont versés avant impôt. Cet ajustement de l'impôt des entreprises et des particuliers s'appelle le principe d'intégration.

Or, selon le CQFF, les paramètres du fédéral font en sorte que les Québécois sont davantage imposés que les résidents des autres provinces par une marge de 1,2 à 3,4 points de pourcentage. Le phénomène dure depuis au moins 2008.

Principe d'intégration non respecté

Dans son courriel, le ministère des Finances du Canada reconnaît que la portion fédérale des impôts sur les dividendes ne respecte pas le principe d'intégration.

«Le crédit d'impôt fédéral pour dividendes ne peut atteindre l'intégration en raison d'un abattement spécial de longue date négocié il y a près de 50 ans et qui fournit aux contribuables québécois une réduction de 16,5% en impôt fédéral. Seul le Québec bénéficie de ce traitement. Néanmoins, toutes les provinces, y compris le Québec, ont le pouvoir d'ajuster elles-mêmes - et le font souvent - leurs taux de crédit d'impôt pour dividendes afin d'atteindre l'intégration», nous écrit le Ministère par l'entremise de sa porte-parole Stéphanie Rubec.

Actuellement, pour 100$ avant impôt gagné par une grande entreprise au Québec, le montant d'impôt effectivement perçu par le fédéral sur les dividendes, au bout du compte, est de 26,78$. Or, pour que l'intégration entreprise-particuliers soit respectée - et que l'impôt soit équivalent à celui des salaires -, le prélèvement devrait être de 24,22$, soit 2,56$ de moins.

Cet écart devrait être comblé par Québec, ce qui obligerait le ministre péquiste Nicolas Marceau à diminuer son impôt sur les dividendes de 6 à 18%.

Avec la collaboration de Denis Lessard