On s'en doutait, la grève de deux semaines dans l'industrie de la construction non résidentielle a pesé lourd dans la croissance économique du Québec.

En fait, le produit intérieur brut (PIB) réel a reculé de 1,4% en juin, indique l'Institut de la statistique du Québec (ISQ).

Pour l'ensemble du trimestre, le PIB réel recule de 2,9% en rythme annuel, alors qu'il a progressé de 1,7%, d'un océan à l'autre.

Le repli de juin, le plus important des quatre enregistrés cette année, n'est pas uniquement attribuable à l'industrie de la construction dans le secteur non résidentiel. Si on l'exclut du calcul, la décroissance se chiffre tout de même à 0,3%.

Le secteur manufacturier, qui pâtit depuis un an, est l'autre grand responsable. Seize industries sur dix-neuf affichent des reculs.

Seuls la consommation des ménages et les investissements des entreprises ont augmenté durant le trimestre. Autre facteur positif, le solde commercial, tant interprovincial qu'international, s'est amélioré, mais reste déficitaire.

Le plongeon de juin permet d'espérer un rebond en juillet. Toutefois, le repli de 0,2% des ventes des fabricants ainsi que le recul de l'emploi en juillet et en août semblent indiquer que cet élan n'aura pas permis de rattraper de sitôt le terrain perdu au printemps.

De janvier à juin 2013, le Québec a enregistré une croissance mensuelle seulement en janvier et en février.

Techniquement, il faut deux trimestres consécutifs de décroissance (plutôt que six mois) pour parler de récession. Cette distinction s'explique par le fait que la variation trimestrielle de la taille de l'économie est calculée sur les bases des comptes nationaux qui incluent le solde des échanges commerciaux avec l'extérieur de même que les variations des stocks des entreprises.

La variation mensuelle du PIB est mesurée par industrie seulement. (Les États-Unis ne publient d'ailleurs pas de PIB mesuré par industrie sur une base mensuelle.)

La dernière récession, celle de 2008-2009, s'était étalée de l'été 2008 au printemps 2009, avec une décroissance annualisée de 2,9%, 4,0% et 1,8%. Il s'agissait d'un des reculs les plus faibles parmi les provinces canadiennes, recul que n'a pu néanmoins récupérer ni le secteur manufacturier, ni le volume de nos exportations.

Le Québec a par ailleurs connu trois récessions techniques entre les deux récessions classiques de 1990-1992 et de 2008-2009.

La première est survenue durant la campagne référendaire de 1995, la deuxième durant l'éclatement de la techno-bulle suivie des attentats du 11 septembre 2001. La troisième, enfin, durant 2003, l'année des grandes calamités où l'épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) , les incendies de forêt en Colombie-Britannique, la crise de la vache folle et, surtout, la brutale remontée du huard avaient perturbé les débouchés québécois durant deux trimestres.

Ces trois récessions techniques n'avaient cependant pas empêché le Québec d'afficher une légère croissance pour chacune de ces années.

Les économistes prévoient toujours que l'expansion de l'économie québécoise se poursuive en 2013, bien qu'à un rythme anémique. Selon l'ISQ, l'acquis de croissance après six mois est de 0,9%, soit un peu moins que le chiffre de 1,4% du Canada dans son ensemble.

Cet acquis s'explique par la forte expansion de janvier (0,6%) et celle plus modeste de février (0,2%).

Toutefois, les mauvais chiffres publiés hier amènent la Banque Nationale à ramener de 1,2% à 1,0% sa prévision de croissance, soit la même que celle de la CIBC, publiée plus tôt cette semaine. C'est moins que la prévision de 1,3% du ministre des Finances, Nicolas Marceau, dans sa mise à jour budgétaire d'avril.

La décroissance printanière éclaire aussi les rentrées fiscales plus parcimonieuses à Québec.

Le PIB nominal, c'est-à-dire exprimé en dollars courants, recule de 1,2% en rythme annualisé. Le PIB nominal est le meilleur indicateur de la variation de la taille de l'assiette fiscale.