Même si elle reconnaît que certaines pratiques seront difficiles à changer, la Commission de la construction du Québec (CCQ) a bien l'intention de faire respecter les nouvelles règles d'embauche sur les chantiers de construction.

Dès lundi, le placement syndical dans les chantiers de la province cédera sa place au «Carnet référence construction», disponible en ligne (carnet.ccq.org) et qui permettra aux employeurs de choisir leurs travailleurs.

Les associations syndicales seront en mesure de proposer leurs services à des employeurs, mais elles devront cependant avoir en leur possession une certification en bonne et due forme du ministère du Travail, notamment.

De leur côté, les employeurs devront identifier tout besoin de main-d'oeuvre afin d'informer l'ensemble des associations syndicales.

«On ne va pas "détricoter" 40 ans de placement (...) en deux jours et demi, explique la présidente-directrice générale de la CCQ, Diane Lemieux, en entrevue. Je suis très consciente que l'accueil vis-à-vis ces changements n'est pas égal partout.»

La PDG de la CCQ ne craint pas que ce guichet unique pour le placement de la main-d'oeuvre ne provoque des situations où des travailleurs seraient appelés à travailler loin de leur lieu de résidence en raison de ratés administratifs.

«Avant d'embaucher un travailleur de l'extérieur d'une région donnée, il faut avoir épuisé la liste des travailleurs qui se trouvent dans le territoire, souligne Mme Lemieux. Le système est fait pour respecter cette règle de base.»

Le président de la FTQ Construction, Arnold Guérin, ne partage pas l'opinion de Mme Lemieux en ce qui a trait à la mobilité de la main-d'oeuvre.

«Ce n'est pas des machines qui vont régler ça, dit-il. Il faut des contacts. Ils ont besoin de nous autres pour faire fonctionner cela.»

Le bâton en cas de besoin

La présidente de la CCQ rappelle que le personnel de son organisation surveillera de près l'application de nouvelles règles, et, qu'au besoin, la Commission va sévir à l'endroit des individus ou des organisations qui vont tenter de «contourner le système».

«On cherche à ce que l'industrie se conforme, affirme Mme Lemieux. Dans le cas où nous allons noter des situations problématiques, nous allons sortir le bâton.»

La PDG de la CCQ n'a cependant pas précisé quelles pénalités pourraient être infligées aux contrevenants.

Cette dernière a aussi avoué que certains éléments pourraient être à corriger, ajoutant cependant que la CCQ se donne «un bon deux mois» pour observer avant d'apporter les modifications nécessaires.

«C'est un nouveau système, rappelle Mme Lemieux. Il ne sera pas parfait. On va le bonifier, on va l'enrichir.»

La Loi 33, qui abolit le placement syndical, ne fait pas l'affaire de tous, puisqu'elle est contestée devant les tribunaux par le Conseil provincial des métiers de la construction ainsi que la FTQ Construction, deux grandes organisations syndicales de la construction.

En entrevue, M. Guérin a réitéré que ces nouvelles dispositions en matière d'embauche briment la liberté d'association garantie par les chartes des droits.

«On peut former un pays à 50% plus un et nous, on ne peut même pas négocier ou signer de convention collective», dénonce le président de la FTQ Construction.

La loi stipule que pour qu'une convention collective négociée puisse être entérinée, elle devra non seulement recevoir l'aval de la majorité des ouvriers qui voteront, mais aussi d'au moins trois organisations syndicales sur cinq.

M. Guérin dénonce cette pratique, alors que le Conseil et la FTQ Construction, à l'heure actuelle, représentent ensemble 70% des ouvriers de la construction.

Ce dernier a confirmé que son organisation avait l'intention de se conformer à la nouvelle réglementation malgré la contestation judiciaire.

De son côté, Mme Lemieux a expliqué que malgré cette contestation judiciaire, tant qu'un tribunal n'aura pas tranché, tous devront se conformer aux nouvelles pratiques en matière d'embauche.

Quant au Conseil provincial des métiers de la construction, il n'a pas voulu réagir à la sortie de Mme Lemieux.