L'industrie québécoise de la construction est peut-être encore au coeur de sa saison la plus vigoureuse, mais la Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics, adoptée en décembre dernier, pourrait compliquer la tâche de certaines entreprises au cours des prochains mois, voire les prochaines années.

Rappelant que les mesures visant à assurer de saines pratiques dans l'industrie de la construction étaient nécessaires, le président du Conseil du patronat du Québec (CPQ), Yves-Thomas Dorval, a souligné, mardi en entrevue, que les carnets de commandes de certaines grandes entreprises sont de moins en moins bien garnis.

«Beaucoup de ces entreprises arrivent à la fin de ces commandes, observe-t-il. L'impact est réel et on va voir que ça va influencer l'industrie de la construction.» Selon M. Dorval, il s'agit principalement de grandes entreprises de construction et de génie-conseil visées par des mesures d'intégrité et habituées de faire des affaires avec le secteur public.

Pour le président du CPQ, il s'agit en quelque sorte d'une période de transition. «On n'avait pas le choix de faire des changements, rappelle-t-il. Quand on fait des changements, il y a des impacts, et nous les vivons actuellement.»

Mais si certaines entreprises doivent subir les conséquences de certains gestes posés antérieurement, il en va autrement pour d'autres compagnies. «Certaines (entreprises) réussissent à tirer leurs marrons du feu, observe M. Dorval. Des entreprises qui ont souffert de certaines pratiques ont actuellement la chance de réussir.»

Le président du CPQ s'attend également à un certain ralentissement pour une autre raison.

«Dans la période qui a suivi la dernière récession, soit de 2008 à 2012, le Québec était dans une phase intensive de projets de construction, rappelle-t-il. Il est donc normal qu'il y a ait un certain ralentissement à un moment donné, même si les besoins demeurent importants.»

De longs délais

L'obligation des entreprises à obtenir une autorisation de l'Autorité des marchés financiers (AMF) afin de pouvoir soumissionner sur les chantiers publics de plus de 40 millions de dollars pourrait aussi retarder l'octroi de certains contrats dans le secteur de la construction.

Une porte-parole de l'AMF, Cathy Beauséjour, a expliqué que dans le meilleur des cas, l'organisme a besoin d'au moins 40 jours ouvrables afin de compléter l'analyse d'un dossier.

«L'intention, ce n'est pas de tourner les coins ronds», a-t-elle affirmé en entrevue.

De plus, la période d'analyse peut varier selon la complexité du dossier de l'entreprise concernée, selon Mme Beauséjour. «Dans certains cas, il y a des risques que ça prenne plus de 40 jours.»

Depuis la mi-janvier, l'AMF a reçu plus de 200 demandes afin d'obtenir une autorisation afin de soumissionner sur ces types de contrats. Jusqu'ici, 112 entreprises ont reçu cette autorisation.

L'organisme est également chargé d'analyser les dossiers des deux plus bas soumissionnaires de 175 contrats de la Ville de Montréal visés par décret.

De son côté, l'Association de la construction du Québec (ACQ), qui représente quelque 16 000 entreprises des secteurs industriel, institutionnel et commercial, a répété le message livré par son président Jean Pouliot, en novembre 2012, à l'Assemblée nationale, dans lequel il affirmait que son association était en faveur de l'application de telles mesures.