Touché par la crise européenne, le Cirque Éloize n'a pas le choix de partir à la conquête de nouveaux horizons, confie son président, Jeannot Painchaud, au cours d'une entrevue réalisée à son bureau à Montréal, où il était de retour après un séjour au Japon et en Chine.

«Pour réaliser nos rêves artistiques et pour être capable d'assurer la pérennité de notre organisation, on doit croître davantage», dit le patron de l'entreprise qui conjugue les arts du cirque avec le théâtre, la danse et la musique. Son budget annuel s'élève à 10 millions de dollars, un chiffre qui n'a pas bougé dans les dernières années.

Les artistes d'Éloize vendent en effet moins de spectacles en Europe depuis deux ans, en raison de l'état de l'économie.

«Maintenant, on n'est pas obligés de faire 100 millions, mais trois spectacles à temps plein sur la route feraient vivre convenablement l'entreprise. On en a deux actuellement», indique M. Painchaud, 47 ans.

Les deux spectacles en tournée sont Cirkopolis, qui part prochainement pour le Mexique, et iD, au Japon.

«Le Japon, pour moi, c'est une grande réalisation», dit M. Painchaud, qui a lui-même été acrobate pour le Cirque du Soleil, puis pour Éloize, qu'il a créé avec six artistes des Îles-de-la-Madeleine au début des années 90.

«Il a délaissé la scène en 1998 pour se consacrer à la direction artistique des spectacles et à la gestion. Au printemps 2012, Éloize a embauché Christian Leduc comme DG. M. Painchaud peut consacrer ses énergies à la croissance des affaires comme à cette première véritable tournée japonaise de la troupe, qui fait équipe avec le producteur Fuji Television.

Retour en force aux États-Unis

Outre l'accent mis sur les marchés émergents comme l'Asie et l'Amérique du Sud, le Cirque entend aussi revenir en force aux États-Unis, marché qu'elle a quelque peu délaissé au profit de l'Europe dans les dernières années.

En janvier, l'organisation a annoncé la signature d'une entente avec le Proctors de la ville de Schenectady, dans l'État de New York, qui deviendra en quelque sorte sa résidence d'été pendant trois semaines chaque été au cours des cinq prochaines années.

Le Proctors espère vendre 60 000 billets du spectacle Cirkopolis qui y tiendra l'affiche du 7 au 24 août 2013.

Éloize, avec neuf créations originales à son actif, plus de 4000 représentations en salle de théâtre et 3 millions de spectateurs, a su élaborer son propre modèle économique à succès depuis sa création en 1993.

La troupe ne s'autoproduit pas, à la différence de son copropriétaire, le Cirque du Soleil, qui détient 50% de l'entreprise depuis 2010. L'autre moitié appartient à M. Painchaud et à son associé, Jonathan St-Onge.

Depuis ses débuts, Éloize vend ses spectacles à des producteurs, qui en assument le risque financier. La troupe a aussi fait le choix de développer de front deux réseaux: celui des salles de centres culturels et le réseau des salles commerciales. Les événements d'entreprise produisent entre 15 et 20% de ses revenus annuels.

Ces trois réseaux lui ont permis de se faire voir de différents publics, au gré des occasions qui se sont présentées. Le cirque aimerait maintenant fidéliser son public en revenant le visiter aux mêmes dates, à une ou quelques années d'intervalle.

À Montréal, ça pourrait se faire Théâtre Maisonneuve, où Éloize présentera Cirkopolis en novembre prochain, mois anniversaire de l'incorporation du Cirque Éloize.

Pour ses 20 ans, d'ailleurs, l'entreprise s'attend à recevoir comme cadeau la confirmation d'un investissement de 8 millions destiné à la rénovation de son domicile, la gare Dalhousie dans le Vieux-Montréal.