L'emploi dans le secteur des services va continuer d'augmenter à court, moyen et long termes, mais à un rythme bien différent, selon les industries. Il sera plus lent qu'au cours des 10 dernières années.

Les services, qui représentent 70% de la taille de l'économie québécoise (71,5% du PIB canadien), forment une mosaïque «de plus en plus composée non pas de pièces de céramique, mais de pixels qui changent de couleur», explique l'économiste Joëlle Noreau qui signe un dossier fouillé sur la question dans le dernier numéro de Perspective, la revue d'analyse économique de Desjardins.

Prenant l'exemple des journaux, elle montre la difficulté à définir ce qu'est un service à l'heure de la dématérialisation où le papier cède le pas à la toile ou à d'autres supports virtuels.

La croissance plus lente s'explique à la fois par le rythme d'expansion plus faible de l'économie québécoise prévu d'ici 2016 et par la poussée récente du secteur des ressources, susceptible de se maintenir dans la période de projection.

«Il y aura 1,4 million d'emplois à pourvoir au Québec entre 2010 et 2020. De ce nombre 316 000 seront de nouveaux postes, rappelle Mme Noreau. La part des nouveaux emplois qui seront générés par le secteur des services sera de 97%.»

Elle pourfend au passage les vieilles idées reçues selon lesquelles les salaires sont moins élevés dans la production de services que dans la production de biens, que les gains de productivité y sont plus faibles tout comme le taux de survie des entreprises. Pour chacun de ses mythes, sa recherche montre que c'est faux, archifaux.

Santé et services sociaux

Sans surprise, c'est le secteur de la santé et des services sociaux (qui inclut les services de garde) qui devrait connaître la progression la plus forte, vieillissement de la population oblige.

Et à l'inverse, la progression sera beaucoup plus lente dans l'enseignement - qui inclut les cours privés pour les sports, la musique et autres activités artistiques de même que les loisirs.

Les emplois dans le commerce de détail ne se multiplieront pas aussi rapidement que par le passé en raison de l'endettement des ménages et d'une faible augmentation du revenu personnel disponible.

En revanche, les services reliés à la production devraient offrir des perspectives plus attrayantes aux nouveaux diplômés. Le transport et l'entreposage reliés aux secteurs forestiers ou des ressources profiteront de la reprise ou de l'élan de ces industries. Plus près des Montréalais, Mme Noreau note aussi que «les efforts grandissants mis pour favoriser le transport en commun» sont aussi porteurs.

Il y aura aussi une solide offre de travail dans les services professionnels, scientifiques et techniques. Deux pôles nourriront la demande de travailleurs: les grands projets d'infrastructures, depuis la construction de centrales jusqu'à la réfection de routes, de réseaux d'aqueduc et d'égouts, de même que les programmes de respect de l'environnement qui va de la conception d'objets jusqu'à leur recyclage. Sans oublier la gestion sous toutes formes des effets des changements climatiques dans l'agriculture, l'érosion ou la végétation urbaine.

Du côté des services financiers, c'est en planification de la retraite que les perspectives s'annoncent les plus prometteuses, davantage en tout cas que pour les services reliés au marché de l'immobilier, qui ont volé la vedette au cours des 10 dernières années.

Il existe peu d'études sur les perspectives pour les industries culturelles ou reliées à l'information. Chose certaine, la multiplication des applications pour les téléphones intelligents et autres ordinateurs sans fil exigera beaucoup de travail pour les créateurs de logiciels, de jeux vidéo et pour les techniciens en informatique de tout genre.

L'économiste met aussi en lumière le poids relatif très différent des services dans les provinces canadiennes. C'est en Nouvelle-Écosse où il est le plus lourd (79,6%) et à Terre-Neuve-et-Labrador où il est le plus faible (60,1%), talonné, il est vrai, par l'Alberta et la Saskatchewan, deux autres provinces qui regorgent d'hydrocarbures.

Le Québec occupe la septième position. «On oublie souvent que son secteur manufacturier y est plus présent qu'ailleurs au Canada.»

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LE SECTEUR DES SERVICES DANS L'ÉCONOMIE DU QUÉBEC

- Part du PIB réel en 2011 70,90%

- Part des emplois 78,60%

- Part des salaires et traitement 76,10%

- Nombre d'emplois dans les services 3,1 millions

- Croissance de l'emploi dans les services de 2002 à 2011 18,20%

- Croissance de l'emploi dans l'économie de 2002-2011 10,90%

Sources : Statistique Canada, Institut de la statistique du Québec, Desjardins études économiques