Vitrines saccagées, mobilier de terrasses volé et voitures endommagées. Certains commerçants montréalais ont la vie dure depuis que se multiplient au centre-ville les manifestations étudiantes et que des casseurs sont à l'oeuvre.

«C'est plusieurs milliers de dollars pour nous, indique Guylaine Sylvain, gérante de service du restaurant Houston, de la place Jean-Paul-Riopelle. Pour les assurances, on a une franchise de 2500$ à régler.

Depuis un mois, on doit enlever des collants sur nos boîtes à fleurs. On retarde certains aménagements printaniers, car on a peur de se faire briser des choses. Heureusement, on n'a pas eu besoin de la terrasse cette semaine, car on n'aurait pu asseoir que 35 personnes sur 70.»

Vendredi dernier, les voitures de la moitié des employés du Houston ont été endommagées, dont celle de Guylaine Sylvain. «J'ai pour 850$ de dommage sur la mienne», affirme-t-elle.

Hier matin, des vitriers mettaient les bouchées doubles, des protestataires ayant fracassé ou sali avec de la peinture les façades vitrées de la librairie Chapters et de la boutique Apple de la rue Sainte-Catherine Ouest, ainsi que de la Banque Nationale (pour la deuxième fois) et la Banque TD de la rue Sherbrooke Ouest.

«Il faut de deux à quatre heures pour remplacer une vitre, note un employé de Vitre avec vous, dont le camion était rempli de vitres neuves. On est occupés depuis une semaine. Tout ce que j'ai dans mon camion, c'est pour aujourd'hui. Les entreprises touchées doivent non seulement payer pour faire installer d'autres vitres, mais elles doivent engager des gens pour monter des barricades avant notre arrivée.»

Chaque fois, pour remplacer une vitre, la Banque Nationale paie de 3000$ à 5000$. «Pour l'instant, on parle de plus de 10 000$ de frais», dit Joan Beauchamp, porte-parole de la Banque Nationale.

La gérante du Houston en a ras le bol de la situation qui s'éternise. «Oh que oui, lance Guylaine Sylvain. Il y a des débats entre employés, car la moitié de ceux-ci sont des étudiants. Il y a aussi des craintes quand certains quittent le resto.»

Climat d'incertitude

Et des coûts supplémentaires pour accroître la sécurité des commerces et de leurs employés? Non, a-t-on répondu à La Presse Affaires, hier matin. Les commerces, restaurants et banques visitées conservent le même nombre de gardiens de sécurité qu'à l'habitude.

«Je tiens pour acquis que la vaste majorité des manifestants ne sont pas là pour faire du grabuge, dit Gaston Lafleur, président-directeur général du Conseil québécois du commerce de détail (CQCD). Le grabuge crée un climat d'inquiétude, mais l'élément protection n'est pas une solution.»

Un climat d'incertitude aussi, note le CQCD. «Des gens préfèrent se tenir loin du centre-ville», dit Gaston Lafleur.

«Les manifestations ont considérablement fait baisser la fréquentation et conséquemment les ventes, dit Anthony Fafet gérant adjoint du magasin Rudsak, de la rue Sainte-Catherine Ouest. Les gens ont un peu plus peur de venir au centre-ville. Mais c'est toutMontréal qui va être touché.»

En 2011, les ventes au détail au centre-ville de Montréal s'élevaient à 15 milliards, en hausse de 2,5% par rapport à 2010, selon le CQCD. Les manifestations qui se multiplient, la présence de casseurs et les rencontres qui achoppent entre les associations étudiantes et le gouvernement auront-elles une influence négative sur celles-ci?

«De telles activités viennent perturber les activités courantes, mais je ne pense pas que ça ait une incidence significative sur les ventes, répond Gaston Lafleur. Beaucoup d'autres facteurs pèsent davantage, comme la situation économique et la tenue ou non du Grand Prix du Canada à Montréal. Les manifestations étudiantes n'ont pas lieu 24h sur 24.»

En gref:

101,4 milliards


Ventes au détail dans tout le Québec

45 milliards

Ventes dans la grande région de Montréal

15 milliards

Ventes au centre-ville de Montréal

Sources: Groupe Altus et Conseil québécois du commerce de détail