Le grand patron de la plus importante entreprise de construction au Québec, Pomerleau, s'est dit «étonné», mardi, des nombreuses affaires de collusion et de corruption révélées au cours des dernières années.

«Il y a 25 000 entrepreneurs au Québec. Bon, il y en a peut-être qui ne sont pas droits comme une barre, mais je pense qu'en regardant ça globalement, c'est une bonne industrie», a déclaré Pierre Pomerleau à l'issue d'un discours prononcé à la tribune de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Il a même lancé que l'encadrement et la réglementation de l'industrie étaient peut-être devenus «exagérés», avant d'ajouter: «mais c'est peut-être pour le mieux, ça fait en sorte qu'on est, je pense, une industrie extrêmement «clean».

M. Pomerleau a notamment soutenu qu'il lui est interdit d'aller luncher avec les représentants de sociétés d'État comme la Régie des installations olympiques.

Le dirigeant a en outre déploré le fait que le gouvernement et les municipalités donnent la priorité à la question budgétaire en octroyant généralement leurs contrats aux plus bas soumissionnaires. Il souhaiterait qu'on accorde plus d'importance aux aspects «qualitatifs» des dossiers, comme c'est le cas, d'après lui, en Ontario et ailleurs au pays.

«On veut tellement que ça soit propre, bien organisé, bien structuré, et qu'il n'y ait rien à se reprocher qu'aujourd'hui, on met un peu moins l'accent sur la qualité», a-t-il affirmé, faisant écho à des propos semblables tenus il y a quelques mois par la porte-parole des firmes de génie, Johanne Desrochers.

Selon Pierre Pomerleau, il est possible de considérer davantage les critères qualitatifs sans ouvrir la porte à l'arbitraire. «Mettre en place des systèmes évaluant la qualité des proposants, ça se fait très bien partout dans le monde entier», a-t-il noté.

Ces critiques n'ont toutefois pas empêché M. Pomerleau de marteler que «la qualité de la construction ici est inégalée dans le monde entier».

«Placement syndical»

Pierre Pomerleau s'est par ailleurs réjoui mardi de l'adoption de la loi 33, qui mettra fin au «placement syndical» dans la construction. Il a estimé que cette mesure se traduirait par des économies de coûts importantes pour les entreprises, et a même laissé entendre qu'elle pourrait avoir plus d'impact sur l'industrie que la Commission Charbonneau sur la corruption et la collusion.

«L'impact de la loi 33 va être à mon point de vue beaucoup plus grand que l'impact de trouver trois ou quatre entreprises» qui ont fraudé, a-t-il lâché.

En fait, M. Pomerleau ne craint pas que la commission Charbonneau ternisse davantage l'image du secteur.

«Je ne pense pas que ça va écorcher l'image de l'industrie de la construction, a-t-il dit. Au contraire, on va arrêter d'en parler et on va se rendre compte que c'est une industrie comme toutes les autres, où une grande majorité d'entreprises sont éthiques et quelques entreprises sont peut-être moins éthiques.»

Fondée en 1964, Pomerleau a franchi l'an dernier le cap du milliard de dollars en revenus. L'entreprise, qui emploie plus de 2000 personnes, prévoit réaliser un chiffre d'affaires de 1,35 milliard de dollars en 2012.

Pomerleau exclut de faire son entrée à la bourse, jugeant que la valeur attribuée aux entreprises de construction y est insuffisante.