Le déficit du Québec est beaucoup moins élevé que prévu pour la première moitié de l'année budgétaire, indique un document du ministère des Finances. À tel point que le gouvernement peut compter sur un coussin de plus de 1 milliard de dollars pour affronter les temps incertains qui s'annoncent.

En décembre, le ministère des Finances du Québec a publié son rapport mensuel des opérations financières. Le document est passé inaperçu, bien qu'il contienne des données surprenantes. Les chiffres portent sur les six premiers mois de l'exercice budgétaire, soit d'avril à septembre 2011.

Pour ce premier semestre, le déficit atteint 506 millions de dollars. Or, le déficit annuel prévu est de 3,8 milliards, soit un rythme semestriel de 1,9 milliard. Autrement dit, le déficit de la première moitié de l'année est d'environ 1,4 milliard de moins que ce à quoi on pouvait s'attendre.

«Je suis surpris. Ces chiffres expliquent peut-être l'assurance du ministre des Finances, Raymond Bachand, quant à l'atteinte de l'équilibre budgétaire», a dit l'économiste Jean-Pierre Aubry.

À 506 millions, le déficit semestriel de 2011 est même moitié moindre que celui de 2010, qui avait atteint 1,0 milliard.

Jean-Pierre Aubry, de même que l'économiste Benoit Durocher, du Mouvement Desjardins, signalent toutefois que l'écart entre les dépenses et les revenus fluctue beaucoup d'un mois à l'autre. De plus, le déficit du deuxième semestre est souvent plus important que celui du premier, notamment en raison des ajustements de fin d'année budgétaire.

L'an dernier, par exemple, le déficit annuel avait atteint 3,2 milliards, alors qu'il n'était que de 1,0 milliard après six mois. La deuxième moitié de l'année, qui se termine le 31 mars, avait donc accumulé un déficit deux fois plus grand que la première.

Il reste que, cette année, pour que les prévisions s'avèrent, le deuxième semestre devrait connaître un revirement très important.

Le déficit de la seconde moitié de l'année devrait être de 3,3 milliards pour que l'année se termine avec le déficit de 3,8 milliards prévu. Le déficit du deuxième semestre serait donc six fois plus élevé que les 506 millions du premier.

L'emploi, inquiétant

Benoit Durocher et Jean-Pierre Aubry signalent que les chiffres sur l'emploi des derniers mois de 2011 sont inquiétants.

«La croissance économique s'est ramollie à l'automne. L'emploi et les autres données économiques seront moins favorables au budget du gouvernement au cours des prochains mois», dit M. Durocher.

Au cours du dernier trimestre de 2011, Statistique Canada a en effet annoncé que le Québec avait perdu 69 500 emplois, faisant passer le taux de chômage de 7,3% en septembre à 8,7% en décembre. Ces emplois moins nombreux risquent de se répercuter sur les recettes du gouvernement, par l'entremise dles taxes à la consommation et de l'impôt sur le revenu des particuliers, entre autres.

Au cours du premier semestre budgétaire, ces revenus du gouvernement ont été plutôt bons. Ils ont crû de 6,1% par rapport à l'année précédente, à 32,1 milliards de dollars, alors que le gouvernement s'attend à une croissance annuelle de 4,4%.

Les revenus tirés de l'impôt des sociétés ont crû de 16,1%, ceux de l'impôt des particuliers, de 3,8%, et les taxes à la consommation, de 13,2%. Dans ce dernier cas, cependant, la hausse n'est pas attribuable à la vigueur économique, mais à la hausse d'un point de pourcentage de la TVQ. Une hausse d'un point se traduit par une hausse semestrielle des revenus d'environ 800 millions pour le gouvernement. La hausse a finalement été de 855 millions.

Au chapitre des dépenses, la croissance semestrielle a été de 2,6% pour l'ensemble des programmes (santé, éducation, etc.), un niveau plus important que la prévision annuelle de 1,9%. Le service de la dette (intérêts et capital) a toutefois crû moins rapidement que prévu (7,9% comparativement à 10,6%).

Au ministère des Finances, on ne s'émeut guère des chiffres du premier semestre, bien qu'ils soient surprenants. «On considère qu'on est à l'intérieur de nos prévisions», a déclaré le porte-parole, Jacques Delorme.

Il fait notamment remarquer que le déficit prévu de 3,8 milliards comprend une «provision pour éventualités» de 400 millions. Si aucun événement fâcheux ne survient, cette provision ne sera pas utilisée, ramenant le déficit prévu à 3,4 milliards.

Le gouvernement prévoit retrouver l'équilibre budgétaire dans deux ans, au terme de l'exercice 2013-2014. L'an prochain, le déficit devrait attendre 1,5 milliard, si l'on se fie aux prévisions du gouvernement.