L'acquisition de Goodrich par United Technologies Corporation (UTC) risque de déclencher une nouvelle vague de transactions qui pourrait toucher l'industrie québécoise de l'aéronautique.

«Les concurrents peuvent vouloir se repositionner, indique le responsable de l'équipe de l'aérospatiale et de la défense de PricewaterhouseCoopers (PwC) au Canada, Mario Longpré, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires. Ils voient qu'UTC prend une part de marché intéressante, ils veulent répliquer.»

PwC publie chaque trimestre un rapport sur les fusions et acquisitions dans le monde de l'aérospatiale et de la défense. Ce trimestre-ci, c'est la transaction entre UTC et Goodrich qui vole la vedette. C'est en septembre dernier que la multinationale, qui chapeaute notamment Pratt & Whitney, Hamilton Sundstrand et Sikorski, a annoncé son intention d'acquérir le fabricant de trains d'atterrissage Goodrich. Si la transaction de 16,2 milliards US va de l'avant, elle constituera la plus grosse transaction de toute l'histoire du secteur de l'aérospatiale et de la défense. Elle dépassera l'acquisition de McDonnell Douglas par Boeing, une transaction de 13,3 milliards US annoncée en décembre 1996.

Les concurrents d'UTC pourraient être tentés de mettre la main sur diverses entreprises, y compris des sociétés québécoises comme Héroux-Devtek [[|ticker sym='T.HRX'|]], pour élargir leur présence sur le marché.

Héroux-Devtek, établie à Longueuil, fabrique notamment des trains d'atterrissage et d'autres composants pour l'industrie aéronautique.

«Ça peut aller d'un côté comme de l'autre, a toutefois fait valoir M. Longpré. Héroux-Devtek peut être une cible, mais elle peut aussi être un acquéreur. Elle n'a rien caché, elle a indiqué qu'elle voulait faire des acquisitions.»

Il a rappelé que dans le cas de transactions importantes, il arrivait souvent que l'acquéreur se départisse d'actifs qu'il juge moins stratégiques. Ceux-ci pourraient intéresser les entreprises d'ici.

«C'est certain qu'il y a des choses qui vont bouger, a affirmé M. Longpré. Il s'agit de voir à quel niveau, de quel côté. C'est ça qui est intéressant.»

La transaction entre UTC et Goodrich pourrait avoir un autre impact sur l'industrie québécoise de l'aéronautique. Les entreprises québécoises qui sont déjà des fournisseurs d'un des membres de la famille UTC, comme Pratt&Whitney Canada, pourraient profiter de leurs contacts pour essayer de mettre les pieds chez Goodrich.

«C'est comme n'importe où, quand tu as des contacts, ça aide», a soutenu M. Longpré.

La transaction entre UTC et Goodrich a fait grimper la valeur des transactions annoncées au troisième trimestre. Elle n'était que de 4,6 milliards US au troisième trimestre de 2010, elle est passée à 19,6 milliards US à la même période de 2011.

Dans son rapport, PwC affirme que cette transaction illustre le fossé entre le segment de la défense et de l'aérospatiale.

«La production d'avions est en hausse en raison de la croissance des flottes en Asie et des remplacements d'appareils en Amérique du Nord, peut-on lire dans le rapport. Pendant ce temps, l'incertitude quant à l'effet des mesures d'austérité dans les budgets gouvernementaux assombrit les perspectives de l'industrie de la défense. Cette différence saute aux yeux dans les évaluations des fusions et acquisitions: elles sont plus basses dans la défense et plus élevées en aérospatiale.»

PwC a aussi remarqué que les liquidités des grandes sociétés s'amélioraient et que les entreprises américaines procédaient à de plus en plus de transactions.

«Ces facteurs montrent que le marché des fusions et acquisitions en aérospatiale et en défense est très sain alors qu'il entre dans le quatrième trimestre», peut-on lire dans le rapport.