Le vaste plan de développement sur 20 ans proposé par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) soulève déjà plusieurs critiques. Mais, pour le Conference Board, il pourrait représenter le salut de la plus grande ville québécoise.

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Mario Lefebvre, économiste au Conference Board, s'inquiète de la croissance anémique de Montréal depuis 25 ans. La ville est devenue ingérable en raison de sa lourdeur administrative, fait-il valoir, au point où le Québec devrait se doter d'un «Plan Sud» pour remettre sa métropole sur les rails.

Dans ce contexte, le plan de la CMM, qui structurera le développement du Grand Montréal jusqu'en 2031, tombe à point et représente un «espoir», a dit M. Lefebvre à La Presse Affaires hier. «Il y a cette initiative-là, on va l'applaudir, parce c'est la seule initiative que je connaisse!»

Le plan de la CMM vise entre autres à favoriser la densification des habitations et l'adoption du transport en commun, dans une optique de développement économique. L'organisme tiendra des audiences publiques sur son plan à partir de la semaine prochaine, et la version définitive sera adoptée d'ici au 31 décembre.

Même si sa mise en oeuvre s'annonce complexe, Mario Lefebvre se réjouit de l'adoption prochaine du projet de la CMM. «Honnêtement, je n'ai aucune idée d'où ils vont s'en aller avec ça, mais je fonde espoir, parce que je cherche des espoirs.»

Cri du coeur

Dans un cri du coeur publié cette semaine, Mario Lefebvre, qui dirige le centre des études municipales du Conference Board, réclame un «Plan Sud» pour Montréal, en référence au Plan Nord du gouvernement Charest. La prospérité du Québec tout entier dépend de la bonne tenue de l'économie montréalaise, et celle-ci fait plutôt mauvaise figure depuis un quart de siècle, dénonce-t-il.

«Le Québec a des ressources, comme l'hydroélectricité, une population hautement scolarisée et de nombreuses autres... mais il lui manque quelque chose, a-t-il écrit. Le vrai problème, c'est Montréal.»

M. Lefebvre souligne que la progression annuelle du produit intérieur brut (PIB) montréalais a dépassé 2% seulement neuf fois au cours des 25 dernières années, dont deux fois dans la dernière décennie. Étant donné le poids de Montréal dans l'économie du Québec, cette sous-performance a contribué à maintenir la croissance provinciale en deçà de la moyenne canadienne. Celle-ci s'est élevée à 2% au Québec depuis 25 ans, comparativement à 2,4% dans le reste du pays.

L'économiste déplore en outre les graves problèmes de gouvernance de la métropole, amplifiés depuis les «défusions» municipales de 2006. Et il dénonce le piètre état des infrastructures - comme l'échangeur Turcot et le pont Champlain -, qui laisse planer un nuage d'incertitude sur l'économie locale.

Pas tout noir

Michel Leblanc, président de la chambre de commerce du Montréal métropolitain, partage plusieurs des constats du Conference Board. Mais il souligne que certains dossiers majeurs ont débloqué depuis 18 mois, notamment la construction des deux superhôpitaux.

«Quand on a fait notre forum stratégique sur les grands projets (en mars dernier), il y avait pour 13 milliards de dollars en cours de réalisation à Montréal, a-t-il dit. Au moment où on se parle, il y a des tours de bureaux qui sont en chantier ou qui seront lancées au cours des 6 à 12 prochains mois.»

M. Leblanc note aussi la remarquable tenue du secteur de la construction résidentielle, qui a connu en 2010 - et encore cette année - un véritable boom. Autant d'investissements privés «qui sont un signe de confiance dans l'économie montréalaise».

Quant au plan métropolitain d'aménagement de la CMM, Michel Leblanc s'y montre favorable. Ce sera la première fois depuis la création de la CMM en 2001 que l'organisme adopte un véritable plan, a-t-il souligné, admettant au passage que «le scepticisme est justifié».

Le processus d'adoption de ce plan de 20 ans s'annonce mouvementé. Avant-hier, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ) a proposé un dézonage de 5% des terres agricoles du Grand Montréal, afin d'éviter une pénurie de terrains d'ici 2031. L'Union des producteurs agricoles s'est montrée scandalisée par cette demande.

La CMM estime pour sa part que les 160 km2 de terrains situés en «zone blanche» seront suffisants pour assurer le développement des 20 prochaines années dans les 82 villes de son territoire.