Pour éviter le bain de sang, les couples qui divorcent trouvent souvent des solutions à l'amiable pour partager leur patrimoine sans tout séparer moitié/moitié:- «Je garde la maison en ville, tu prends la résidence à la campagne.»

- «Je te laisse la maison, mais je conserve mon régime de retraite.»

Pourquoi pas, si les actifs ont à peu près la même valeur? Mais il y a un «léger» problème: la facture fiscale. En tenant compte de l'impôt, les actifs n'ont pas du tout la même valeur. Le partage n'est plus équitable.

Maison contre pension

Disons que Monsieur laisse à sa femme la maison d'une valeur de 400 000$, en échange de quoi il conserve pour lui tout seul son régime de retraite qui vaut aussi 400 000$.

«Dans ce cas-ci, Monsieur se fait avoir, parce que la maison c'est de l'argent après impôt, contrairement au régime de retraite. On compare des pommes avec des oranges. Il faut faire bien attention à l'impact fiscal», insiste l'avocate Sylvie Schirm.

Quand on sépare les actifs, il faut faire deux colonnes. D'un côté, la colonne des actifs non imposables avec la résidence principale, les voitures, etc. De l'autre côté, la colonne des actifs imposables avec le REER et le régime de retraite, etc. Il faudra ensuite évaluer le taux d'imposition... qui dépend de plusieurs hypothèses.

Maison contre chalet

Il ne faut surtout pas oublier que la résidence principale est à l'abri de l'impôt... Mais pas les résidences secondaires, ni les immeubles à revenus.

Avant 1982, chaque individu avait droit à une exemption d'impôt sur sa résidence principale. Désormais, il n'y a qu'une seule résidence principale par couple... marié.

«Mais la règle est entrée en vigueur seulement en 1993 pour les conjoints de fait», précise Sylvain Chartier, expert-conseil chez Banque Nationale Gestion privée 1859. Donc, pour les couples qui vivaient en concubinage, il est possible de réclamer d'exemption pour le chalet et la maison jusqu'en 1993.

Sinon, il n'y a qu'une seule exemption d'impôt par famille. Mais les familles qui ont deux résidences peuvent désigner l'une ou l'autre comme résidence principale. Le chalet ou la maison en ville. C'est leur choix. Peu importe l'endroit où ils habitent le plus souvent.

Supposons qu'il y a un divorce. L'un des conjoints garde le chalet, l'autre le condo en ville. S'il n'y a rien de prévu, le premier qui vendra risque d'utiliser l'avantage fiscal. Et celui qui vendra en deuxième devra payer l'impôt sur le gain en capital, pour les années de vie commune. Une mauvaise surprise qui peut tomber des années après le divorce.

Notez qu'il est très facile pour le fisc de vérifier que les deux personnes formaient un couple durant une certaine période et que la déduction a déjà utilisée par le premier conjoint.

Idéalement, il faut spécifier dans les documents du divorce comment sera séparée l'exemption pour la résidence principale.

Attention: «L'impact fiscal n'est pas le même sur les deux résidences», prévient Guylaine Lafleur. La notaire a déjà vu une différence de 200 000$, selon que le couple utilisait l'exemption sur l'une ou l'autre des deux maisons qui avaient pourtant la même valeur.

Pour en avoir le coeur net, il faut calculer le gain en capital sur chacune des résidences durant la période de vie commune, et ensuite établir la facture d'impôt qui découlerait de la vente.

De manière générale, le couple a intérêt à s'entendre pour utiliser l'exemption fiscale sur la résidence qui s'est le plus appréciée.

Mais tous ces calculs peuvent être compliqués. Et il est possible d'utiliser différentes stratégies pour maximiser l'abri fiscal... et faire en sorte que le couple paie le moins d'impôt possible.

«Le problème, c'est que les couples n'y pensent jamais», dit M. Chartier.

Taxe de bienvenue

Après le divorce, chacun peut avoir sa propre résidence principale. Mais le couple doit procéder rapidement au transfert des propriétés, sinon il devra payer des droits de mutation, indique Sylvie Schirm, avocate spécialisée en droit de la famille.

Les couples mariés disposent d'un délai de 30 jours après le jugement du divorce. Quant aux conjoints de fait, ils ont 90 jours après la fin de leur vie commune pour faire la transaction pour être exonérés des droits de mutation. «Il faut être vigilant: vérifier avec le notaire, vérifier avec la ville qui peut avoir des règlements différents», dit l'avocate.

En passant, elle suggère de ne jamais rester copropriétaire avec son ex après le divorce. «Ça risque d'être plus coûteux de retourner en cour pour régler ces problèmes-là que lorsqu'on va en cour pour obtenir le divorce», dit Mme Schirm.

Si le toit coule, qui paie la note? Si l'un des conjoints n'a pas l'argent, que fait-on? «Il vaut mieux couper les liens économiques», estime Mme Schirm.