Le Québec continue de bien tirer son épingle du jeu dans l'industrie du capital-risque. Après avoir mieux résisté à la crise que l'ensemble du Canada, la province rebondit maintenant davantage que les autres, au point où on parle maintenant... de «société distincte du capital-risque».

Le capital-risque, cet argent parié sur de jeunes entreprises souvent non rentables dans l'espoir de créer des succès à la Google, a grimpé de 11% au Québec au dernier trimestre pour atteindre 112 millions. Les niveaux d'investissements ont baissé de 2% dans l'ensemble du Canada pendant la même période.

Après six mois, le bilan québécois est en hausse de 23% pour 2011, davantage que la hausse de 10% observée au Canada.

Distinction

«C'est la différence québécoise dans toute sa splendeur», lance Geneviève Morin, chef de la direction financière et du développement corporatif de Fondaction CSN et coprésidente de Réseau capital, regroupement du capital- risque québécois.

Selon elle, le Québec récolte aujourd'hui les fruits «des efforts de concertation faits par tout le monde depuis quelques années».

Mme Morin explique qu'il y a cinq ou six ans, les acteurs de l'industrie se sont mobilisés au Québec pour favoriser l'émergence de fonds privés, dont la mission est d'investir dans les meilleures entreprises dans l'espoir de les voir percer.

Des investissements stratégiques dans des fonds étrangers ont aussi permis d'intéresser les investisseurs d'ailleurs, principalement américains, aux entreprises québécoises.

Aujourd'hui, Mme Morin vante la diversité des acteurs du capital-risque québécois. Au cours du dernier trimestre, par exemple, les fonds fiscalisés comme le Fonds de solidarité FTQ ou le Fondaction CSN ont réalisé un peu plus de la moitié des investissements, contre 24% pour les fonds étrangers et 14% pour les fonds privés locaux.

Autre bonne nouvelle relative pour le Québec: non seulement les fonds québécois investissent davantage que les fonds canadiens, mais leurs coffres ne se vident pas comme ceux des fonds canadiens.

La situation dans le reste du Canada est carrément dramatique: après six mois, les nouveaux engagements de capitaux ont chuté de 46% par rapport à l'an dernier, pourtant la pire collecte de fonds des 16 dernières années.

Le Québec, lui, a réussi à maintenir son niveau d'engagement.

Rester vigilant

«Même si la collecte de fonds au Québec n'a pas diminué, elle se situe à un niveau historiquement bas, avertit toutefois Mme Morin. La situation demeure donc préoccupante, d'autant plus que la chute constatée ailleurs au Canada montre ce qui pourrait arriver si le Québec relâchait ses efforts.»

Selon elle, le fait que le Québec évite ici le drame est peut-être dû à «l'effet Teralys», ce fonds de fonds créé par Québec en 2009 justement pour renflouer les fonds de capital-risque et dont les répercussions se font enfin sentir.

Les trois fonds d'amorçage lancés par Québec pour soutenir les très jeunes entreprises semblent aussi commencer à porter leurs fruits.

«C'est ça, la différence québécoise. On constate qu'il y a un problème en démarrage. Puis les gens s'inquiètent, tout le monde se regroupe, le gouvernement donne un appui de taille et ça conduit à ces trois fonds, qui sont très dynamiques et qui animent le marché», dit Mme Morin.

Fait intéressant, les investissements dans le secteur des technologies propres ont explosé au dernier trimestre, attirant presque 10 fois plus d'argent qu'un an auparavant avec 31 millions. Le secteur des sciences de la vie, à l'inverse, a décliné de 27%.