Les inondations dans le Haut-Richelieu ont submergé 2000 hectares de terres agricoles, mais les cultivateurs de partout dans la province ont les pieds dans la flotte. Des pluies deux fois plus abondantes que la moyenne provoquent des retards majeurs dans la période de semence, si bien que la Financière agricole prévoit déjà une baisse de rendement pour la saison 2011.

Selon ses dernières estimations, la Financière agricole estime que de 40% à 45% des terres de la province ont été semées jusqu'ici, une opération qui est d'habitude terminée à ce temps-ci de l'année. La situation oblige les producteurs à planter des variétés plus précoces pour éviter que leurs plants soient surpris par le gel automnal, ce qui risque de plomber la récolte.

«On devra nécessairement s'attendre à un rendement un peu moindre en raison du changement de variété, indique Gérard Blais, agronome et directeur régional de la Financière agricole pour la Montérégie. On pourrait dire à ce stade-ci que ce serait peut-être de l'ordre de 10% ou moins.»

Réal Gagnon n'a pas encore semé le tiers de sa terre de 500 hectares, située à Pike River, en Montérégie. Non, ce producteur de maïs et de soya n'a pas subi la crue du Richelieu, même s'il est établi près de la zone sinistrée. Les pluies des dernières semaines ont tellement gorgé sa terre d'eau que son tracteur pourrait l'endommager. Alors, il fait ce que la plupart de ses confrères font dans la région: il attend.

«Pour ceux qui comprennent le baseball, je dirais qu'on part avec une prise contre nous», illustre Réal Gagnon.

Les cours du maïs et du soya sont élevés, souligne ce cultivateur, mais encore faut-il en avoir à vendre. Forcé de planter sur le tard, il sèmera des variétés moins performantes. Il perdra environ une tonne de grain pour chaque hectare de terre.

Partout au Québec

La crue de la rivière Richelieu a provoqué des milliers d'évacuations et inondé 2000 hectares de terres agricoles, selon le ministère de l'Agriculture.

Les producteurs qui sont épargnés par les inondations ont dû composer avec la pluie. Et leurs confrères de partout au Québec sont aux prises avec le même problème.

«Peu importe la région, au Lac-Saint-Jean, au Saguenay, dans le Bas-Saint-Laurent, en Estrie, à Québec, à Montréal, on a observé des précipitations largement au-dessus de la normale, souligne René Héroux, météorologue à Environnement Canada. Ça avait été le cas en avril.»

Dans les régions du sud-ouest de la province, dit-il, les précipitations ont été à peu près deux fois plus importantes que la moyenne le mois dernier.

En date du 24 mai, à peine le tiers des terres agricoles avaient été semées, selon la Financière agricole, un chiffre qui a été révisé entre 40% à 45% hier. Le blé, l'orge, le maïs-grain, le soya, toutes les cultures sont touchées. Et ce, dans toutes les régions du Québec sauf une: l'Abitibi-Témiscamingue, où les précipitations ont été inférieures à la moyenne.

Doigts croisés

Il est encore trop tôt pour parler d'une catastrophe, mais les agriculteurs devront croiser les doigts, souligne Benoît Legault, directeur de la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec. L'été et l'automne devront être chauds pour sauvegarder la récolte.

«Ça pourrait causer un problème, a-t-il convenu. Mais il est possible que la chaleur permette de rattraper le retard pendant les mois de juin et juillet. Et si l'on a un automne plus sec, avec un gel tardif, on pourra tout de même avoir une récolte intéressante avec une qualité intéressante.»