Après les centres commerciaux et les tours de bureaux, le groupe immobilier de la Caisse de dépôt ajoute un troisième axe de croissance en investissant à l'avenir dans les tours d'appartements. Des annonces sont prévues prochainement. Une transaction d'envergure est attendue en 2011. À terme, ce secteur occupera jusqu'à 10 % du portefeuille immobilier de l'institution québécoise.

« L'avantage de l'immobilier multirésidentiel est qu'il donne un rendement plus stable que les bureaux ou les centres commerciaux avec un niveau de risque moindre, explique le nouvel homme fort de l'immobilier à la Caisse, qui a la carrure d'un footballeur. Il a d'ailleurs joué comme ailier éloigné à l'Université Princeton. M. Fournier a confirmé récemment la nomination de Sylvain Fortier, comme président et chef de la direction, Ivanhoé Cambridge Résidentiel.

« Si on peut trouver ici un portefeuille d'appartements ayant une masse critique (autour de 300 logements ou 100 millions $), c'est notre premier choix (comme investissement). Pourrait-il y avoir une transaction en 2011 ? «Votre intuition est bonne», a-t-il répondu en riant.

La Caisse a déjà un portefeuille d'appartements d'une valeur de 1,5 milliard, principalement à New York. Elle n'a pas encore décidé si elle confierait la gestion à l'externe. Le sujet est délicat comme on l'a constaté cette semaine avec la fermeture de la résidence pour personnes âgées Le Monaco, propriété de Maestro, une filiale de la Caisse. Celle-ci voudra-t-elle courir le risque de traîner ses locataires devant la Régie du logement pour obtenir 10 $ de plus sur son loyer mensuel?

La portion du portefeuille multirésidentiel pourra atteindre 10 % ou 3 milliards à terme. Les acquisitions éventuelles devraient se concentrer à Montréal, New York, Boston ou Washington, indique Daniel Fournier.

Plan de match

Nous avons rencontré Daniel Fournier à ses bureaux de la Caisse le jeudi 12 mai, histoire de faire le point sur la stratégie immobilière de la Caisse au terme de la réflexion stratégique qui a commencé en 2009 et qui a débouché sur le regroupement des filiales immobilières sous le chapeau d'Ivanhoé Cambridge, annoncé le 21 avril

Le groupe immobilier envisagera désormais ses investissements avec une vision d'ensemble. «Nous étions éparpillés avec nos 30 milliards de $ d'actif, nos 356 immeubles dans 90 villes situées dans 24 pays», dit celui qui porte dorénavant le titre président du conseil et chef de la direction du Groupe Ivanhoé Cambridge. Conseil d'administration unique, regroupement de services administratifs et celui de la recherche, autonomie des filiales, la Caisse deviendra mieux équipée pour concurrencer les fonds souverains et autre méga investisseurs institutionnels.

«Il y a sept ou huit ans, tu pouvais acheter avec un milliard une société immobilière intéressante. Il y a deux semaines à New York, on a vendu une bâtisse pour 1,2 milliard », dit M. Fournier.

Voici, en résumé, à quoi ressemblera le plan de match du groupe immobilier pour les années à venir.

Dans les centres commerciaux, Ivanhoé Cambridge réinvestira dans ses centres de pointe au Canada d'où provient 75 % de ses revenus courants. Elle regardera attentivement aux États-Unis, où elle n'y détient que 3 % de son actif.

Par ailleurs, les investissements dans les pays émergents passeront par elle. Au Brésil, Ivanhoé Cambridge agit déjà comme propriétaires ou gestionnaires dans 17 centres commerciaux. Active en Chine depuis 2005, elle détient en partenariat deux galeries marchandes dont Le Nova, à Changsha, dans la province du Hunan.

SITQ, filiale spécialisée dans les immeubles de bureaux, concentrera ses efforts dans les villes où elle dispose d'une plate-forme. Au Canada, à Montréal, Vancouver et Calgary; aux États-Unis, à New York, Boston, Washington, peut-être Seattle; en Europe, à la Défense à Paris.

Non à l'ouverture du capital-action

La caisse ferme la porte à l'ouverture du capital-action de son groupe immobilier, une idée évoquée à l'automne 2010 par René Tremblay, prédécesseur de M. Fournier. L'équipe immobilière à la Caisse de dépôt, avec ses 2000 employés, ressemble à un État dans l'État. Les désinvestissements à venir dans le secteur hôtelier et dans les fonds privés, annoncés par William Tresham, patron de SITQ, en entrevue dans La Presse, le 2 février, donne amplement de marge de manoeuvre au groupe pour tenir tous ses gens occupés sans avoir à hausser la part relative du secteur immobilier dans les portefeuilles des déposants de la Caisse.

Finalement, Otéra, filiale méconnue, autrefois cachée au sein de Cadim, filiale «cow-boy» du groupe immobilier qui faisait ce que Ivanhoé Cambridge et SITQ ne faisaient pas se concentrera dans son rôle de prêteur hypothécaire de premier rang au Canada dans le secteur commercial, une fonction historique à la Caisse, qui demeure l'une des rares caisses de retraite à jouer au banquier. Elle s'est retiré des prêts mezzanines, plus risqués.