Augmenter davantage le taux de redevances comme le propose la chef péquiste Pauline Marois risquerait de faire fuir les sociétés minières, estime le gouvernement Charest.

Hier, Pauline Marois a indiqué qu'un gouvernement péquiste conserverait le Plan Nord, mais corrigerait ses «failles», le régime de redevances par exemple. Elle propose la création d'un poste de commissaire aux mines pour s'assurer que les ressources du sous-sol «rapportent aux Québécois des montants suffisants».

«Nous n'allons pas jeter le Plan Nord. Nous allons le prendre tel qu'il est, et nous allons le gérer à notre façon et selon des règles qui nous apparaissent importantes», a-t-elle affirmé en conférence de presse.

Pauline Marois s'engage à revoir le régime de redevances. Le gouvernement Charest l'a modifiée l'an dernier. Le taux de redevances applicable sur le profit augmente graduellement depuis pour passer de 12% qu'il en était en 2010 à 16% en 2012. Le calcul du profit annuel se fait maintenant mine par mine plutôt que pour chaque exploitant. Québec a revu certaines déductions permettant aux minières de réduire les redevances à verser à l'État. Il a abaissé le taux de l'allocation pour amortissement, par exemple.

Mais ce régime de redevances reste «désuet» et fait en sorte qu' «on n'en a pas pour notre argent», estime Pauline Marois. Selon elle, il y a encore trop de déductions qui viennent réduire le «profit minier» et, par conséquent, le montant des redevances.

Surtout, le taux de 16% n'est pas assez élevé à ses yeux. Un gouvernement péquiste fixerait un taux de base pouvant aller de 16% à 20%. Un taux pourrait être fixé pour chaque minerai. Ensuite, plus les profits d'une mine seraient importants, plus le taux serait revu à la hausse, a suggéré Mme Marois. «En même temps, on sait parfois qu'il faut qu'il y ait une marge acceptable, sinon l'entreprise ne viendra pas, n'est-ce pas?» Le Québec pourrait s'inspirer de l'Australie, selon elle. Le pays a revu sa fiscalité applicable aux minières pour récupérer 30% des profits excédentaires - c'est-à-dire les profits qui vont au-delà d'un rendement d'environ 8% après impôts.

Pour Pauline Marois, un commissaire aux mines, indépendant du gouvernement, est indispensable pour s'assurer que les données utilisées par les minières dans le calcul des redevances sont justes, «pour être certains qu'on ne se fait pas flouer».

Pauline Marois estime «très peu» élevés les investissements publics de 500 millions de dollars en cinq ans pour des prises de participation dans des projets miniers, surtout que l'on prévoit des investissements privés de 8,4 milliards sur la même période. La chef péquiste a insisté sur un «rythme d'exploitation de la ressource avantageux pour la collectivité», déplorant que le Plan Nord ne prévoit rien à ce sujet. «Il ne faut pas exploiter cette ressource en l'espace de 15 ou 20 ans en ne laissant rien à ceux et celles qui nous suivent.» Elle a dit qu'il faut «prendre avec un grain de sel» les 80 milliards d'investissements publics et privés en 25 ans annoncés par Jean Charest en dévoilant son Plan Nord.

Le ministre des Finances, Raymond Bachand, accuse la chef péquiste de «vivre dans le passé, sur une autre planète», «de tromper la population» au sujet des redevances. Quand Pauline Marois parle des maigres redevances versées par les minières, «elle parle d'un régime qui n'existe plus depuis la fin de mars 2010». «On a un préjugé comme Québécois en disant: on se fait fourrer par les minières depuis 50 ans. Excusez le langage, mais on pense tous ça, quand on prend une bière avec des chums. Mais la réalité, ce n'est plus ça», a affirmé Raymond Bachand au cours d'une conférence de presse en compagnie de son collègue du Développement économique, Clément Gignac.

Selon M. Bachand, le régime québécois est aujourd'hui l'un des plus exigeants au Canada. Il permettra de toucher 1,4 milliard en redevances au cours des cinq prochaines années, a-t-il noté. C'est sans compter les revenus tirés de l'impôt des sociétés.

Augmenter encore le taux de redevances serait risqué selon lui. Avec un taux de 16%, «on pense qu'on a atteint probablement le seuil où on va chercher notre juste part, le plus d'argent possible, mais en s'assurant de ne pas mettre en danger les investissements qui s'en viennent.» La concurrence internationale est forte, a-t-il insisté.