L'entreprise de construction Catania réoriente ses activités et cessera de solliciter des contrats d'infrastructures, a appris La Presse Affaires. Après avoir réalisé d'importants travaux publics au cours des dernières années, elle se concentrera uniquement sur la construction résidentielle et commerciale.

La société a annoncé à ses employés qu'elle ne participera plus aux appels d'offres en vue de décrocher des contrats municipaux et provinciaux, la semaine dernière. Elle travaillait dans le domaine des infrastructures depuis environ 20 ans. «Chez Catania, on est d'abord et avant tout une société de construction de projets immobiliers résidentiels et commerciaux, a résumé le porte-parole de l'entreprise, Daniel Granger. C'est l'activité principale de l'entreprise et les marchés publics, tels que les travaux d'infrastructures, ont toujours représenté un faible volume.»

Catania honorera ses trois derniers contrats publics avant de se retirer du marché. Elle travaille au prolongement d'un quai dans le port de Montréal, à la construction d'un viaduc sur le chemin 104 à La Prairie, sur la Rive-Sud, et à la réfection de l'usine d'épuration des eaux de Pierrefonds.

L'entreprise est aussi sur le point de terminer trois autres contrats, d'une valeur totale de 27,5 millions de dollars, avec la Ville de Montréal, a indiqué le porte-parole de la Ville, Philippe Sabourin.

À terme, la décision pourrait entraîner la mise à pied de huit ou neuf employés au siège social, a indiqué M. Granger. Les contrats des travailleurs de construction ne seront tout simplement pas renouvelés au terme des chantiers.

Des contrats majeurs

L'entreprise, dont le siège social est à Brossard, a raflé des contrats majeurs à Montréal au cours des dernières années. Elle a piloté la réfection du boulevard Saint-Laurent, en 2008, un contrat de 11 millions. Elle a également obtenu un contrat de 3 millions pour la reconstruction d'une conduite secondaire sous la rue Notre-Dame.

Le parti Vision Montréal a récemment relevé que la société a décroché les quatre contrats sur lesquels elle avait soumissionné pour la réfection de l'usine d'eau de Pierrefonds, pour une valeur totale de 30 millions.

Mais c'est un autre projet de l'entreprise, le Faubourg Contrecoeur, qui l'a plongée dans la controverse. Catania a acquis cet immense terrain de la Ville de Montréal pour y bâtir un projet résidentiel. La transaction a été entachée d'irrégularités, ont conclu le vérificateur général de la Ville ainsi que la firme Deloitte.

Dans la foulée de l'affaire, le directeur de la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), Martial Fillion, a été démis de ses fonctions. La nouvelle administration a lancé des procédures judiciaires pour obliger Catania à dévoiler les coûts de décontamination du Faubourg Contrecoeur. Faute de quoi elle pourrait exiger un prix de vente beaucoup plus élevé pour le terrain.

La Sûreté du Québec a ouvert une enquête sur le dossier. L'escouade Marteau a mené deux perquisitions au siège social de Catania, en janvier et en mars 2010.

La SHDM, qui n'avait pas été informée de la réorientation de Catania, a assuré hier que la construction et les ventes du Faubourg Contrecoeur vont bon train. Elle a récemment donné son feu vert à la troisième phase du projet. M. Granger confirme que ce chantier n'est pas compromis, puisqu'il s'agit d'un projet résidentiel. La majorité des infrastructures que devaient bâtir l'entreprise sont déjà terminées.

Catania pilote un autre projet résidentiel, le Château Maplewood, qui a été vivement critiqué dans l'arrondissement d'Outremont. Des résidants s'opposaient à ce qu'un immeuble patrimonial, l'ancien couvent des soeurs de Mont-Jésus-Marie, soit converti en condos de luxe. Le projet est cependant bloqué, puisque les opposants contestent le changement de zonage qui a donné le feu vert au projet devant les tribunaux.

À la fin de février, le bureau de vente du Château Maplewood a été la cible d'un incendiaire.

La décision de Catania d'abandonner le domaine des infrastructures survient moins de deux semaines après qu'un autre important acteur dans le domaine, Infrabec, se fut placé sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers. Ses deux dirigeants, Giuseppe et Lino Zambito, ont été arrêtés par l'escouade Marteau en compagnie de l'ex-mairesse de Boisbriand, Sylvie St-Jean, ainsi que de France Michaud, vice-présidente de la firme de génie-conseil Roche.