La Cour d'appel a accepté d'entendre une cause cruciale pour l'industrie du courtage en valeurs mobilières. Il s'agit du jugement de la Cour du Québec qui rend illégales les amendes imposées aux courtiers fautifs.

En octobre 2010, la juge Brigitte Gouin, de la Cour du Québec, avait semé la consternation dans le milieu du courtage en valeurs mobilières. Dans un jugement, elle affirmait que l'organisme d'autoréglementation qui régit l'industrie n'a pas le pouvoir d'imposer des amendes aux courtiers qui ne respectent pas les règles.

L'organisme en question -l'OCRCVM- se retrouve donc sans munition pour discipliner ses membres au Québec. La décision de la juge Gouin est maintenant en suspens depuis que la Cour d'appel a accepté, à la fin décembre, d'entendre la cause.

L'OCRCVM est l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières. Pour pratiquer leur métier, les courtiers doivent obligatoirement en être membres.

Au printemps 2007, l'organisme a imposé une amende et des frais de 56 114$ à l'ex-courtier Marc Beaudoin. L'ACCOVAM reprochait alors à M. Beaudoin son refus de collaborer à une enquête sur son rôle dans la gestion de certains comptes canadiens de Martin Tremblay, des Bahamas.

Selon l'organisme, un membre qui ne collabore pas à son enquête commet une faute grave, puisque ce non-respect des règles mine la confiance du public dans le système financier.

Depuis la sanction à M. Beaudoin, l'organisme ne s'est pas fait payer son dû. Il a donc demandé à la Cour du Québec d'homologuer la décision disciplinaire contre Marc Beaudoin. Or, le 27 octobre, la Cour du Québec a refusé cette homologation. Essentiellement, le tribunal a conclu que l'Autorité des marchés financiers (AMF) ne lui a «pas délégué son pouvoir de percevoir des amendes».

Louis-Philippe Séguin

Par ailleurs, un autre tribunal, soit le Bureau de révision des valeurs mobilières, a rendu une décision presque opposée à celle de la Cour du Québec, à la fin décembre.

Dans cette affaire, un autre ex-courtier, Louis-Philippe Séguin, contestait l'autorité de l'OCRCVM. Essentiellement, M. Séguin soutenait que son contrat d'adhésion à l'OCRCVM ne l'obligeait pas à comparaître devant un enquêteur de l'organisme en 2006 puisqu'il avait alors quitté l'industrie.

En outre, il estimait que la sanction qui lui a été imposée pour son refus de collaborer à son enquête était inappropriée. Comme sanction, l'OCRCVM lui a imposé 77 000$ de frais et amendes, en plus d'une interdiction permanente d'exercer le métier de courtier.

Dans une décision étoffée de 108 pages, le Bureau a rejeté les prétentions de M. Séguin et estimé que les amendes étaient justifiées.

Rappelons que les courtiers membres de l'OCRCVM sont assujettis aux règles de l'organisme jusqu'à cinq ans après leur démission. Ils doivent de ce fait se soumettre aux exigences et aux enquêtes de l'organisme même après leur départ, tel que le stipule leur contrat.

L'enquête de l'OCRCVM portait sur les activités de M. Séguin lorsque ce dernier était conseiller en placements pour la firme Jones Gable, à Montréal, avant décembre 2005. Entre autres, l'ACCOVAM voulait poser des questions à M. Séguin sur le compte d'un de ses clients des Bahamas, la firme Kenneth W. Salomon Investment Fund. Cette firme avait Martin Tremblay comme bénéficiaire déclaré, mais il a été démontré par la suite que Martin Tremblay n'était qu'un prête-nom.