Un avis du Conseil du statut de la femme révèle que 28% des 100 plus grandes entreprises du Québec sont administrées par des conseils où ne siège aucune femme. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, ce ne sont pas uniquement des entreprises de secteurs traditionnellement masculins qui portent le bonnet d'âne.

Air Canada, Walmart Canada, Hôtels Fairmont, le détaillant de vêtements pour femmes Reitmans et trois compagnies d'assurance-vie partagent cette caractérisque d'avoir un conseil d'administration (CA) 100% hommes.

Est-ce que les CA exclusivement masculins devraient être un vestige du passé? a-t-on demandé à Isabelle Hudon, présidente de la Financière Sun Life au Québec et administratrice de sociétés.

«Totalement, répond-elle. D'ailleurs, je suis surprise qu'il y a des dirigeants de conseil qui se permettent d'avoir des conseils uniquement masculins en 2010. Trente pour cent des entreprises, c'est énorme» s'exclame-t-elle.

Pas d'évolution

Autre fait troublant, la place des femmes dans les cercles du pouvoir tend à plafonner.

«On constate que les choses n'ont pas évolué énormément depuis 10 ans», dit Brigitte Simard, associée chez Korn Ferry. Selon une étude maison, le nombre de conseils comptant au moins une administrative est passé de 50 à 56% au Canada depuis 1998.

Mme Simard dirige la section québécoise du mouvement Women On Board qui jumelle cinq administrateurs d'expérience avec cinq futures administratrices pendant 24 mois. L'objectif est que le mentor fasse accéder sa pupille à l'un des conseils auxquels il siège.

Insatisfait des résultats qu'il a observés, le Conseil du statut de la femme recommande l'introduction d'une certification «Égalité» ou l'assujettissement de l'octroi de crédits d'impôt pour la recherche et développement (R-D) à l'implantation d'un programme d'accès à l'égalité incluant la parité homme femme au sein du conseil.

«Les entreprises qui décrochent des contrats de 100 000$ et plus du gouvernement sont déjà obligées de déposer une politique d'accès à l'égalité», fait valoir Christiane Pelchat, présidente du Conseil.

Le monde patronal trouve bureaucratiques pareilles suggestions. «Je suis horrifiée des recommandations. Ça n'a pas de bon sens», critique Françoise Bertrand, PDG de la Fédération des chambres de commerce du Québec.

Administratrice de Quebecor, Mme Bertrand préfère le travail en coulisse. «Si quelqu'un quittait le conseil de Quebecor, j'ai une responsabilité à faire valoir auprès de Jean Nevueu (président) et du comité de nomination des candidatures valables de femmes», dit-elle.

Les mesures coercitives ont pourtant donné des résultats dans le cas des sociétés d'État du Québec. Le nombre de femmes est passé de 31% à 45% parmi les administrateurs depuis 2006, date d'entrée en vigueur de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État qui exige la parité homme femme au c.a. d'ici décembre 2011.

Sans réclamer pareilles mesures pour le secteur privé, Thea Miller, administratrice déléguée de Women on Board au niveau canadien, croit que les entreprises du pays doivent réagir.

Elle souligne que, dès janvier prochain, les entreprises inscrites à la Bourse d'Australie devront rendre publics leur politique en matière de diversité, de même que le nombre de femmes au conseil et dans le haut management et le nombre de femmes au sein de l'entreprise dans son ensemble. «En cas d'absence de femmes des lieux de pouvoir, les entreprises devront fournir des explications», dit-elle.

Repères

> 15,8% de femmes sur les CA des 100 plus grandes entreprises québécoises

> 5 entreprises seulement sur 100 ont plus de 40% de femmes au CA

> 45,4% de femmes sur les conseils des sociétés d'État visés par la Loi sur la gouvernance