La Bourse de Montréal a l'oeil sur le marché découlant des importantes réformes financières adoptées après la grave crise d'il y a deux ans.

Il s'agit du resserrement réglementaire touchant les produits dérivés hors cote, c'est-à-dire échangés directement entre les institutions financières et les gestionnaires de gros portefeuilles.

Ce marché de centaines de milliards de dollars en Amérique du Nord seulement, pourtant très opaque, a été désigné comme l'une des plus importantes causes de la crise bancaire de l'automne 2008.

Mais, d'ici deux ans, le marché des dérivés hors cote doit migrer obligatoirement vers des mécanismes établis et réglementés de commerce de valeurs mobilières.

Alléchante occasion

Au Canada, ça représente une alléchante occasion d'affaires pour la Bourse de Montréal et son affiliée CDCC, une spécialiste en contrepartie transactionnelle parmi les grands intervenants des marchés financiers.

«Le marché des produits dérivés hors cote représente un volume de titres échangés qui est presque 10 fois supérieur à celui des dérivés déjà cotés en Bourse. Par conséquent, l'obligation prochaine des hors cote de passer par un organisme de marché reconnu représente un énorme potentiel pour la Bourse de Montréal», explique son président, Alain Miquelon, en entrevue avec La Presse Affaires.

D'ailleurs, ces changements majeurs qui s'amènent sur le marché hors cote sont le principal sujet de discussion à la Conférence canadienne des produits dérivés qui a lieu aujourd'hui et demain dans un grand hôtel de Mont-Tremblant.

Cet événement, organisé par le groupe boursier TMX et sa filiale de produits dérivés, la Bourse de Montréal, regroupe quelque 200 financiers et investisseurs qui sont les plus influents dans cet important marché de titres de gestion de risque de portefeuille.

À cette occasion, Alain Miquelon et ses principaux collègues à la direction de TMX et de la Bourse de Montréal entendent bien faire valoir leurs compétences et leurs ambitions envers le marché hors cote.

Car même si TMX et sa filiale montréalaise sont bien établies comme principales gestionnaires de Bourses au Canada, elles ne peuvent compter sur l'obtention automatique du prochain mandat de gestion des produits dérivés hors cote.

«Nous anticipons de la concurrence de firmes boursières de l'étranger, en particulier des États-Unis et de Londres», admet Alain Miquelon.

En contrepartie, la Bourse de Montréal et TMX misent sur leur offre de compétences établies, mais aussi «proches des enjeux canadiens» pour obtenir l'aval des principaux intervenants du marché hors cote au Canada.

Pour le moment, ces intervenants sollicitent des offres de services. Ils leur restent à peine plus de deux ans, d'ici janvier 2013, pour choisir un fournisseur et implanter les nouveaux mécanismes de marché des dérivés hors cote.

«C'est un échéancier assez serré qui découle des discussions entre chefs d'État et ministres des Finances des pays membres du G20, notamment», souligne M. Miquelon.

Entre-temps, à la Bourse de Montréal, les activités établies ont repris une bonne erre d'aller après les secousses de la crise financière de l'automne 2008 et la récession en Amérique du Nord et en Europe.

Même que le volume total de transactions, à hauteur de 174 000 contrats par jour, est revenu à un niveau record.

Alain Miquelon souligne que ce regain d'activité touche divers types de produits dérivés échangés à la Bourse de Montréal.

Son produit-vedette, les contrats BAX sur les taux d'intérêt, continue de bien performer grâce à l'incertitude persistante envers la conjoncture économique et la direction des taux d'intérêt à la Banque du Canada.

Mais ce sont les autres produits dérivés cotés à Montréal, en particulier les options sur les actions d'entreprise, qui ont attiré le plus de nouveaux clients depuis quelques trimestres.

Par conséquent, leur part du volume total de contrats échangés s'élève maintenant à 50%, comparativement à 30% il y a trois ans.

Selon M. Miquelon, cette diversification de marché devrait se poursuivre avec l'essor de nouveaux produits dérivés, surtout dans le domaine des matières premières.

Depuis juin, par exemple, la Bourse de Montréal a introduit un contrat à terme sur le prix du pétrole lourd à l'intention des négociants en pétrole provenant de sables bitumineux de l'Alberta.