La Caisse de dépôt a mis son portefeuille à l'abri de la crise européenne en larguant pour 4 milliards de dollars d'actions au printemps dernier. Résultat, son rendement de 2,33% la place parmi les meilleurs gestionnaires de caisses de retraite au Canada, du moins pour la première moitié de l'année.

«On a réussi à éviter plusieurs pièges», a commenté hier son président et chef de la direction, Michael Sabia qui, accompagné de ses principaux lieutenants, a rendu publics les résultats de la Caisse pour les six premiers mois de 2010.

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À 2,33%, le rendement obtenu par la Caisse est supérieur de plus de 3% au rendement des indices de référence de ses différentes catégories de placement, qui a été de -0,74%. Cette différence signifie 4,1 milliards de plus pour les déposants.

La Caisse a fait presque aussi bien que les meilleurs gestionnaires de grandes caisses de retraite au Canada, dont le rendement a été de 2,6% au premier semestre. Le rendement moyen des caisses de retraite canadienne a été de -1,4% selon RBC-Dexia.

Michael Sabia, comme d'ailleurs le ministre des Finances Raymond Bachand, voient dans cette performance le résultat des changements apportés au fonctionnement  de la Caisse au cours de la dernière année. «Les changements apportés par la nouvelle haute direction de la Caisse au cours des derniers commencent à porter leurs fruits», a applaudi le ministre des Finances dans un communiqué.

Si Michael Sabia était sur un court de tennis, il ferait très bonne figure, estime pour sa part Michel Nadeau, président de l'Institut pour la gouvernance et ancien dirigeant de la Caisse.

«Il n'a pas encore gagné le set, mais c'est avantage pour», a-t-il commenté. Il a qualifié de «géniale» la décision des gestionnaires de la Caisse de miser au bon moment sur la baisse du marché boursier.

Au 30 juin 2010, la Caisse avait réduit son exposition aux marchés boursiers de 37% à 34%, a précisé hier le responsable des placements, Roland Lescure. Son portefeuille a donc été relativement épargné par la chute des marchés boursiers survenue au deuxième trimestre, avec la crise grecque en toile de fond.

La Caisse a aussi et surtout profité de la bonne tenue de ses investissements hors des marchés boursiers. Son portefeuille d'investissement dans les entreprises a généré un rendement de 14,7% depuis le début de l'année. Les obligations et les titres de dettes immobilières ont réalisé un rendement de 6%. Les placements dans les infrastructures et participations ont produit un rendement de 10,1%.

Michael Sabia s'est dit particulièrement satisfait des investissements dans Quebecor Média, qui a réalisé «une très grande performance», et dans Gaz Métro.

Même le placement dans British Airport Authority, qui gère les aéroports de Londres, ne lui cause plus de souci. La direction de l'entreprise fait du très bon travail, a-t-il dit, et des progrès intéressants ont été réalisés sur le plan financier.

Du côté de l'immobilier, un secteur dans lequel la Caisse détient toujours d'énormes investissements, il y a eu une amélioration au Canada et pas de détérioration aux États-Unis. Au total, l'immobilier a contribué positivement aux résultats, a fait savoir Michael Sabia.

Quant aux tristement célèbres PCCA qui ont saigné la Caisse en 2008 et qui ont été rebaptisés BTAA (pour billets à terme adossés à des actifs), ils n'ont eu aucun impact sur le rendement des six premiers mois de l'année.

Gestion passive

Pour la première fois cette année, les déposants de la Caisse de dépôt ont pu choisir de confier leurs épargnes aux gestionnaires de la Caisse, ce qu'on appelle la gestion active, ou de les placer dans des véhicules qui reproduisent les indices du marché (gestion passive).

Six portefeuilles indiciels sur un total de 17 ont été proposés et les déposants ont bien accueilli cette ouverture de la part de la Caisse. Au 30 juin, 18% de son actif de 135,8 milliards étaient investis dans des portefeuilles indiciels, a-t-on appris hier, soit 24 milliards de dollars.

Ce virage majeur de la Caisse ne fait pas l'unanimité. «On dirait que les dirigeants de la Caisse ont une peur bleue du risque, a commenté Michel Nadeau. Mais le danger, c'est qu'ils ne prennent plus assez de risques.»

Selon lui, si la gestion indicielle prend plus de place, la probabilité que les gestionnaires puissent faire mieux que le marché ira en diminuant. «La tendance à l'indexation est très forte», a-t-il déploré.

Même si la Caisse a commencé l'année 2010 du bon pied, les retraités du secteur public et parapublic se méfient encore. «Les chiffres avancés par la Caisse sont surprenants, a commenté Roch Perreault, premier vice-président de l'Association québécoise des retraités des secteurs publics et parapublics (AQRP).

«Pour le moment, toutefois, nous sommes plutôt sceptiques», a fait savoir l'AQRP, qui n'a toujours pas digéré la perte de 40 milliards de la Caisse en 2008.