«Il faut réveiller le gouvernement, il se passe quelque chose. C'est invraisemblable, ce n'est pas logique», affirme Nicole Poirier, opposante au projet de porcherie de Saint-Louis-de-Gonzague, où elle possède une terre.

Ce qui n'est pas logique, selon Mme Poirier, c'est que des projets de nouvelles porcheries soient mis de l'avant dans une industrie qui vit depuis cinq ans au crochet de l'État en raison de prix du marché largement insuffisants.

> Suivez Hugo Fontaine sur Twitter

En combinant les secteurs porcs et porcelets, l'industrie porcine a reçu plus de 1,6 milliard de compensations du programme d'assurance stabilisation du revenu agricole (ASRA) entre 2006 et 2009. L'État assume les deux tiers des primes du programme ASRA, les producteurs cotisant le tiers restant.

En 2008, par exemple, la Financière agricole a versé 46,09$ de compensation pour chacun des 7,88 millions de porcs produits, afin de compenser les prix trop bas. Il s'agit d'une compensation par tête jamais vue et d'un niveau de production record.

Malgré le fait que les producteurs vendent constamment à perte, de nouvelles porcheries peuvent s'avérer nécessaires, affirment les agriculteurs.

«Des bâtiments deviennent désuets, il faut les remplacer», soutient l'intégrateur Mario Côté. Ainsi, même s'il tend à diminuer sa production, M. Côté reste intéressé aux nouveaux projets qui pourraient accueillir ses porcs.

«Nécessairement, il y aura d'autres constructions pour suivre l'efficacité, avance le président de la Fédération des producteurs de porcs du Québec, Jean-Guy Vincent. Mais elles seront planifiées, en fonction de la demande, des marchés, du respect environnemental et de la population, pour répondre à un objectif de rentabilité, d'efficacité, de qualité et de salubrité du produit.»

Ne pas geler les structures

«On ne peut pas, dans n'importe quel secteur d'activité, geler nos structures de production et nos technologies, souligne pour sa part Daniel-Mercier Gouin, professeur en agroéconomie à l'Université Laval. Si on pense que le secteur a des occasions devant lui, il faut que les investisseurs investissent.»

Plusieurs signaux indiquent en effet que les perspectives de l'industrie s'éclaircissent, après ce que M. Gouin qualifie de «période exceptionnellement longue de bas prix depuis 2005». Les prix se redressent et la production américaine diminue. Le potentiel d'exportations augmente.

«Il serait dommage de manquer la reprise après avoir encaissé les pertes pendant plusieurs années, souligne M. Gouin. Et je parle tant du point de vue des producteurs et des abattoirs que des contribuables.»

Car pour résorber les déficits accumulés du programme ASRA (environ 800 millions), il faudra aussi produire des porcs pendant les bonnes années.