Au rythme où vont les choses, le Québec aura un déficit passablement moins élevé que prévu. L'écart pourrait même s'élever à 600 millions de dollars, a constaté La Presse Affaires.

Dans son budget présenté le 30 mars, le ministre des Finances, Raymond Bachand, prévoyait que l'année 2009-2010, qui a pris fin le 31 mars, se terminerait par un déficit de 4,3 milliards de dollars. Or, le dernier rapport mensuel des opérations financières, publié vendredi dernier, indique qu'on est loin du compte.

Ce rapport, qui présente les dernières données à jour, calcule que le déficit des 11 premiers mois de l'exercice a été de 2,6 milliards. Pour atteindre la prévision de 4,3 milliards, il faudrait donc que le déficit de mars 2010 - 12e mois de l'année financière - atteigne 1,7 milliard. Or, jamais depuis 48 mois le Québec n'a-t-il engrangé un tel déficit mensuel, selon nos vérifications.

Certes, mars est historiquement plus déficitaire que les autres mois de l'année, pour des raisons d'ajustements de fin d'année budgétaire (remboursement d'impôts, etc.). Cependant, les mois de mars des quatre dernières années n'ont jamais atteint un déficit d'une telle ampleur. L'an dernier, en pleine crise financière, le déficit de mars avait été de 1,1 milliard. L'année précédente, c'était 945 millions. Sur quatre ans, la moyenne est de 700 millions.

En somme, en prenant le pire des scénarios depuis quatre ans pour le mois de mars (1,1 milliard), le Québec terminerait l'année 2009-2010 avec un déficit de 3,7 milliards, soit 600 millions de moins que prévu.

«La reprise a été plus vigoureuse qu'attendu. L'économie du Québec a déjà récupéré tout le chemin perdu pendant la récession», a dit l'économiste Benoit Durocher, du Mouvement Desjardins.

M. Durocher prévoit que le déficit du Québec pour 2009-2010 oscillera entre 3,5 et 4,0 milliards. Le coussin serait donc de 300 à 800 millions, estime-t-il.

Au cours des derniers mois, l'économie du Québec, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), a crû au rythme de 1,9%, comparativement à 1,5% pour l'ensemble du Canada.

Cette reprise est de bon augure pour l'année budgétaire en cours, qui se termine le 31 mars 2011.

Le Mouvement Desjardins estime que le PIB continuera de croître rapidement au cours des prochains mois. La croissance du PIB nominal sera de 5%, prévoit Desjardins, comparativement à une prévision de 4% dans le budget Bachand.

«Le problème, c'est que le gain pour le Québec que procurera cette croissance du côté des revenus risque d'être perdu du côté des dépenses», dit M. Durocher.

Le gouvernement a en effet une cible optimiste concernant la croissance des dépenses. Il espère qu'elle sera plafonnée à 2,9% pour l'année en cours. La marche est haute, puisqu'il n'a pas réussi à respecter ses cibles en 2009-2010, dit M. Durocher.

Dans le budget du 30 mars, Québec prévoyait une croissance des dépenses de programme de 3,8% pour 2009-2010. Or, les 11 premiers mois se sont plutôt soldés par une hausse de 4,6%. Benoit Durocher doute donc de la capacité du gouvernement à respecter cette cible de croissance de 2,9%.

Pour l'année en cours, qui se termine le 31 mars 2011, l'économiste estime que le déficit oscillera encore une fois entre 3,5 et 4 milliards de dollars, plutôt que les 4,5 milliards prévus dans le budget Bachand. Le coussin de l'année 2009-2010 se répéterait donc pour l'année en cours, sans se gonfler, néanmoins.

Contribuables, fonctionnaires, dette?

Cette marge de manoeuvre de plusieurs centaines de millions de dollars pourrait permettre au gouvernement d'être moins vorace auprès des contribuables. Québec pourrait aussi choisir de donner un répit aux employés de l'État, actuellement en négociations, ou s'endetter moins.

Au cours des 11 premiers mois de 2009-2010, le gouvernement a vu ses revenus croître de 0,1%, à 57,4 milliards. Le budget de mars prévoyait une décroissance de 0,4%. Du côté des dépenses globales (programme et service de la dette), la hausse a été de 3,2%, à 60 milliards. Québec avait prévu 2,9% dans son budget.