Les primes de départ somptuaires versées à des dirigeants de la Caisse de dépôt et placement qui ont quitté en 2009 soulèvent l'ire des partis d'opposition et des retraités de l'État.

Après avoir perdu 40 milliards $ en 2008, la Caisse de dépôt a remis l'année dernière 3,8 millions $ en indemnités de départ à six anciens cadres de haut niveau, a révélé La Presse, dans son édition de mardi.

À lui seul, l'ex-grand patron Richard Guay - qui avait cédé sa place en plein coeur de la tourmente financière à l'automne 2008 pour des raisons de santé - a empoché une somme de 1 million $.

M. Guay est retourné à l'enseignement en novembre dernier après avoir joué un rôle de conseiller pour le PDG Michael Sabia.

Parti peu après l'arrivée de M. Sabia au printemps 2009, l'ex-vice-président aux marchés boursiers, François Grenier, a pour sa part touché 950 000 $.

Quatre autres anciens dirigeants - Michael Malo, premier vice-président aux fonds de couverture (629 500 $), Christian Pestre (375 000 $), Robert Desnoyers, premier vice-président aux ressources humaines (365 000 $), et Van Phong Pham, responsable de l'informatique (516 000 $) - se sont partagé le reste de la cagnotte.

Pour l'opposition officielle, ces primes de départ sont scandaleuses car elles récompensent des acteurs de la débâcle de 40 milliards $ subie par l'institution en 2008.

«Cela frappe l'imaginaire de voir des gens partir avec un boni de 1 million $, surtout à la suite des résultats catastrophiques qui ont fait perdre le quart des actifs des déposants à la Caisse de dépôt», a soutenu le porte-parole péquiste en matière d'institutions financières, Jean-Martin Aussant.

Alors que le gouvernement Charest prépare des hausses de tarifs et de taxes pour combler le gouffre, la Caisse n'hésite pas à ouvrir les valves pour ses anciens gestionnaires, a-t-il poursuivi.

«On parle de possibilité d'augmentation de taxes et de tarifs pour boucler le budget et on voit une institution d'État dirigée par le ministre des Finances et le premier ministre donner des bonis de cette ampleur. C'est inexplicable et injustifiable», a lancé M. Aussant.

Son vis-à-vis François Bonnardel, de l'Action démocratique, abonde dans le même sens.

Selon lui, le premier ministre Jean Charest n'a pas le courage politique de freiner les ardeurs des grands commis de l'État.

«Cela me met en beau maudit. Obama et Sarkozy ont eu le courage de dire «c'est assez» aux banques et aux entreprises publiques, mais notre premier ministre continue de voguer tranquillement sans mettre son point sur la table», a fulminé le député de Shefford.

Touchée directement par les pertes de la Caisse, l'Association québécoise des retraités des secteurs public et parapublic (AQRP) est aussi montée aux barricades.

«Des dirigeants de la Caisse, dont les résultats sont plus que discutables, (quittent) leur poste avec de scandaleux montants en poche. Cette situation est inacceptable. Le gouvernement doit forcer la Caisse de dépôt et placement du Québec à mettre fin immédiatement à ces pratiques», a déclaré la présidente de l'AQRP, Madelaine Michaud, dans un communiqué.

Mais au bureau du ministre des Finances, Raymond Bachand, une responsable a précisé que les contrats accordés aux gestionnaires prévoyaient une indemnité en cas de «départ involontaire».

«Il s'agit d'exigences contractuelles et légales, conformes aux pratiques du marché. Ces changements étaient critiques dans le but de simplifier la structure de l'organisation», a expliqué la porte-parole du ministre, Anne-Marie Dussault.