Les catalogues pour consommateurs vont-ils rejoindre les téléphones en bakélite et les disques de vinyle dans le... catalogue de la nostalgie?

Pas sûr: le papier n'a pas imprimé son dernier mot. Il y a quelques années, une publicité télévisée nous montrait un père qui extrayait un vélo de la caisse de sa camionnette, devant les yeux écarquillés de son fils: c'était la bicyclette dont il ne restait qu'une silhouette découpée, sur une page du catalogue Canadian Tire familial.

Époque révolue: il est difficile de découper un écran d'ordinateur. Car fin 2008, les catalogues de Canadian Tire ont cédé leur place au site internet de l'entreprise.

Est-ce le prélude à l'extinction des catalogues sur papier? Pas à court terme. Même si le web laboure de plus en plus large, ils ont encore quelques belles années devant eux.

La disparition des catalogues est d'ailleurs un phénomène qui a largement précédé internet. Dupuis Frères avait cessé la publication de son catalogue de vente par correspondance en 1963, plusieurs années avant sa fermeture. Eaton a fait de même en 1976. Dans ces deux cas, il était aisé de comparer les revenus par correspondance au coût du catalogue, et de justifier - ou non - son existence.

Cet exercice est plus difficile avec le catalogue de référence, qui sert d'abord à susciter des visites au magasin. Car ce sont deux bêtes fort différentes. «L'un est un outil promotionnel, l'autre devient en fait le magasin», décrit Johanne Labrecque, professeure en commerce de détail à HEC Montréal.

Le catalogue de vente par correspondance est plus près, dans sa fonction, du site transactionnel sur internet, auquel il réfère le plus souvent. Cette similitude pourrait laisser croire à sa fin prochaine. Pourtant, un sondage réalisé aux États-Unis pour la Direct Marketing Association, dont le Wall Street Journal faisait récemment état, montre que les catalogues demeurent un maillon important, sinon essentiel, de la chaîne d'achat à distance. Chez les détaillants américains qui font l'essentiel de leurs affaires grâce au marketing direct, 62% tirent la plus grande part de leurs revenus de leurs catalogues. Internet est le principal pourvoyeur pour à peine 20% d'entre eux.

«Dans la vente par correspondance, le catalogue n'est pas dépassé», soutient Luc Dupont, professeur de communication à l'Université d'Ottawa. Les consommateurs aiment feuilleter leur catalogue, y dénicher une idée, avant de se rendre sur internet pour passer commande.

Sears résiste

Au Canada, le meilleur exemple de vente par catalogue est encore Sears. Pas question - pour l'instant du moins - de délaisser ces mastodontes, pourtant très coûteux: la version automne-hiver 2009 compte 940 pages!

Internet fait cependant sentir son influence. À la fin des années 90, les gros catalogues de Sears étaient tirés à près de 5 millions d'exemplaires. Celui d'automne-hiver 2009 n'a été imprimé qu'à 3 millions.

«Nous ne l'envoyons qu'aux clients qui ont fait un achat par catalogue au cours des derniers six mois», indique le porte-parole Vincent Power.

Sears Canada compte plus de 1800 comptoirs de cueillette des commandes par catalogue, disséminés dans les coins les plus reculés du pays. «Nous desservons beaucoup de gens en milieu rural, où on ne trouve pas de magasins à rayons, poursuit-il. Chez nous, les ventes par catalogues sont encore vigoureuses et j'imagine que d'autres compagnies auraient continué à imprimer leur catalogue si ça avait été le même cas pour eux.»

Et vlan.