Alors que le carnet de commandes de sa division aéronautique fond à vue d'oeil, Bombardier a reçu une autre mauvaise nouvelle, jeudi: la Cour suprême du Canada a accepté d'entendre un appel présenté par le Koweït, qui conteste la vente d'avions de la multinationale québécoise à l'Irak.

Bombardier [[|ticker sym='t.BBD.B'|]] n'a pas manqué de faire valoir les conséquences économiques de la prolongation de ce bras de fer juridique.

«Nous pourrions subir des impacts significatifs, tant au niveau financier que d'éventuelles mises à pied, si l'accord (conclu avec l'Irak) continue d'être mis en péril de cette façon», a déclaré un porte-parole de Bombardier Aéronautique, Marc Duchesne, au cours d'un entretien téléphonique.

Le Koweït cherche à bloquer la livraison de 10 biréacteurs CRJ900 que l'Irak a commandés à Bombardier au printemps 2008, au coût de près de 400 millions $ US. Le petit pays du Moyen-Orient veut ainsi forcer l'Irak à le dédommager pour une partie des dommages subis lors de la première guerre du Golfe, en 1990.

Dans un jugement rendu en avril, la Cour d'appel du Québec avait rejeté la requête du Koweït, statuant, comme la Cour supérieure avant elle, que le gouvernement irakien bénéficiait d'une «immunité de juridiction» dans cette affaire.

Si la Cour suprême avait refusé d'entendre l'appel du Koweït, Bombardier aurait vraisemblablement pu reprendre la livraison à l'Irak des avions commandés.

Bombardier devait amorcer la livraison des avions à la fin de l'été 2008, mais la Cour supérieure a ordonné la saisie des appareils à la suite d'une requête présentée par Kuwait Airways.

A la suite de l'invasion du Koweït par l'Irak, en 1990, le transporteur koweïtien a entamé des procédures contre Bagdad et Iraqi Airways. Kuwait Airways réclame le versement de 1,2 milliard $ US pour les avions et l'équipement volés ou détruits au cours de l'opération militaire.

Au cours de l'été 2008, un tribunal britannique a ordonné au gouvernement irakien de rembourser les frais juridiques encourus par Kuwait Airways, une somme de 83,5 millions $ US. Cherchant à faire exécuter le jugement et à toucher les sommes que lui doit Bagdad, le transporteur s'est tourné vers la Cour supérieure du Québec, lui demandant de saisir les avions destinés à l'Irak. Le juge Paul Chaput a acquiescé à la requête en août 2008.

Le magistrat est toutefois revenu sur sa décision en octobre et a annulé la saisie, en raison notamment des différences qui existent entre les lois canadiennes et britanniques en matière d'immunité des Etats. Bombardier a livré un premier appareil à l'Irak le 6 octobre, mais a cessé lorsque Kuwait Airways l'a pressé de le faire, puisque la décision du juge Chaput avait été portée en appel.

Bombardier devra vraisemblablement s'abstenir de livrer tout avion à l'Irak d'ici la fin des procédures devant le plus haut tribunal du pays. M. Duchesne n'a pas voulu dire combien des appareils destinés à l'Irak ont été construits et où ils sont entreposés.

Au cours des dernières semaines, Bombardier Aéronautique a annulé de son propre chef deux importantes commandes placées par des entreprises éprouvant d'importantes difficultés financières: l'une provenant du transporteur italien MyAir.com pour 15 CRJ1000 et l'autre de Jet Republic pour 25 avions d'affaires Learjet 60 XR.

L'action de Bombardier a clôturé jeudi à 4,03 $, un cours inchangé par rapport à celui de la veille, à la Bourse de Toronto.