Une remorque sur laquelle s'alignent de gros billots de pruche entre dans la cour de la scierie Clermond Hamel, à Saint-Éphrem-de-Beauce.

Spécialisée dans le bois de construction, la scierie, une de la quinzaine que compte la Beauce, continue tant bien que mal ses activités malgré la construction qui a flanché aux États-Unis.

 

Le président, Carmin Hamel, nous fait visiter les installations de l'entreprise familiale fondée en 1890.

«Il y a eu des années où on envoyait 70% de la production aux États-Unis, mais cette année ce ne sera peut-être que 30%», souligne M. Hamel.

M. Hamel ne le cache pas. Il doit parfois vendre à perte. «Les prix descendent tout le temps. On ralentit la production pour réduire les stocks. Puis les prix baissent à nouveau.»

Dans les derniers mois, il a eu à faire quelques mises à pied et à réduire le temps de travail. Mais au moment de la visite de La Presse Affaires, les 65 employés de l'entreprise étaient au boulot.

C'est que l'entreprise s'est dirigée vers des produits plus spécialisés pour compenser. C'est le cas de la pruche, qui sortira de l'usine en morceaux de 8 pouces sur 10. Ce bois très solide pourra notamment servir à la construction de ponts temporaires. «Ces produits nous permettent d'être corrects», dit M. Hamel. Pour l'instant, du moins.

Car Carmin Hamel, qui représente la quatrième génération de sa famille à la tête de la scierie, soutient que la situation actuelle est inquiétante pour la cinquième génération. «C'est la pire crise que j'ai connue, en tout cas longue comme ça», dit-il.

Il reste positif, mais avec des nuances. «On est optimiste, mais on l'était aussi l'an dernier en prévision de 2009, et l'année d'avant aussi.»

«Mais les choses vont se replacer, ajoute-t-il un peu plus tard. Un bon matin, il va manquer une charge de bois quelque part et ça va repartir.»

Les propriétaires écopent aussi

Du côté des 11 800 propriétaires de lots à bois de la région - la forêt beauceronne est propriété privée à 90% - la crise frappe fort. Le marché du bois de sciage a flanché de 50% en 2008, estime le directeur général de l'Association des propriétaires de boisés privés de la Beauce, Raymond Racine. «C'est une perte de revenus incroyable pour les propriétaires», dit-il.

«Mais le bois de sciage, ça va revenir fort dans la prochaine décennie, soutient M. Racine. Si le dollar canadien ne remonte pas vers les 90 cents US, ce sera très intéressant. Car avec la tendance de la démographie américaine, il y aura une augmentation des besoins en habitation.»

Et géographiquement, la Beauce est collée sur le nord-est américain, un marché fort rentable... quand les temps seront meilleurs.