La nomination de Michael Sabia, ex-PDG de Bell Canada, comme grand patron de la Caisse de dépôt suscite des réactions divergentes. Alors que le scepticisme prévaut chez les gens d'affaires, des politiciens, même au sein du Parti libéral, y voient une décision politique. D'autres s'inquiètent d'un éventuel «manque de sensibilité québécoise « du nouveau responsable du bas de laine collectif.

À la surprise générale, Michael Sabia, ex-PDG de Bell Canada, a été nommé à la tête de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Sa nomination a été annoncée hier matin par le conseil d'administration de la Caisse et entérinée par le gouvernement du Québec.

 

Le gestionnaire de 55 ans remplacera Richard Guay, qui a quitté la direction de l'institution au début de janvier après un congé de maladie pour surmenage. Depuis le départ de Richard Guay, c'est l'homme fort de l'immobilier Fernand Perreault qui assurait l'intérim.

Michael Sabia a été président et chef de la direction de Bell Canada Entreprises (BCE) de mai 2002 à juillet 2008. Sous sa direction, BCE avait été presque vendue à Teachers', la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario. La transaction a avorté à minuit moins une en décembre 2008, après 18 mois de tractations et de débats juridiques.

«Michael Sabia a toutes les qualités d'un leader fort, capable de gérer des situations complexes», a déclaré Robert Tessier, qui est devenu président du conseil d'administration de la Caisse le 5 mars.

Natif de l'Ontario, Michael Sabia s'est dit honoré et fier de prendre la direction de la Caisse, «une des plus grandes réalisations québécoises et une des grandes institutions financières du Canada et dans le monde».

Michael Sabia dit avoir été pressenti «fin janvier, début février» pour diriger la Caisse. Jusqu'au début du mois de mars, comprend-on, son nom figurait parmi quatre candidats finalistes. Deux des candidats ont décliné l'offre.

Quand le gouvernement a sondé les intentions de Robert Tessier pour présider le conseil, début mars, ce dernier a demandé s'il y avait des candidats sérieux au poste de PDG. En voyant le nom de Michael Sabia, Robert Tessier dit avoir été impressionné. Il a donc proposé cette candidature aux trois membres du comité de nomination du conseil de la Caisse, sans rencontrer l'autre candidat. Le comité a approuvé le choix et présenté la candidature de Michael Sabia à l'ensemble du conseil d'administration, hier.

«La passion du Québec»

Michael Sabia réside à Montréal depuis 16 ans. Avant de travailler à BCE, il a été chef de la direction financière du CN, à Montréal, sous la direction de Paul Tellier.

«Combien de temps faut-il demeurer au Québec pour devenir Québécois? M. Sabia a la passion du Québec, de Montréal. Il a appris le français et il est capable de travailler en français. Ça démontre la maturité du Québec. On devrait être fiers de notre société», a dit Robert Tessier.

Le principal intéressé reconnaît que le français est central au Québec et qu'il s'agit de la langue de travail à la Caisse. Avant d'accepter la direction de la Caisse, Michael Sabia dit avoir refusé d'autres postes prestigieux en Europe et en Asie, signe de son attachement à Montréal.

À propos de l'institution, Michael Sabia a déjà divers objectifs en tête. D'abord, il veut renforcer les pratiques de gestion des risques et revoir en profondeur la stratégie de placement. Rappelons que, il y a trois semaines, la Caisse a annoncé une perte de quelque 40 milliards de dollars pour l'année 2008 (-25%).

Michael Sabia veut également rendre la Caisse plus transparente et améliorer la communication avec le public, bien qu'une divulgation trimestrielle des résultats soit exclue. Enfin, il veut travailler main dans la main avec les déposants (RRQ, CSST, RREGOP, etc.).

Michael Sabia a peu d'expérience dans la gestion de fonds, mis à part sa participation aux comités de gestion des caisses de retraite du CN et de Bell. Par contre, l'homme dit bien connaître les milieux financiers, ayant parrainé de très importantes transactions financières chez Bell.

L'ex-PDG de Bell, comprend-on, faisait partie de la liste des candidats que la Caisse considérait au moment où elle a nommé Richard Guay, le 6 septembre 2008. Hier, Michael Sabia a dit que, à ce moment, l'emploi ne l'intéressait pas mais que des circonstances personnelles et l'arrivée de M. Tessier ont changé les choses depuis.