La donnée a beau n'être que mensuelle, son ampleur étonne. En décembre, les revenus que Québec tire de l'impôt des particuliers ont fait un plongeon de 13%. Et voilà que Desjardins s'apprête à abaisser encore une fois ses prévisions de croissance pour la province.

À huit jours du dépôt du budget à l'Assemblée nationale, les dernières données indiquent que les finances publiques du Québec ont fini l'année dans le rouge, et la baisse des revenus provenant de l'impôt des particuliers en est en partie responsable, l'autre gros morceau étant l'impôt des entreprises.

 

Ainsi, selon le dernier Rapport mensuel sur les opérations financières de Québec, l'impôt que les particuliers québécois ont payé est passé de 2,24 milliards de dollars au mois de décembre 2007 à 1,95 milliard en décembre 2008. Novembre avait aussi été négatif, avec un recul de 5,2%.

«Il ne serait pas surprenant de voir d'autres baisses de 13% ou davantage au cours des prochains mois», indique Sébastien Lavoie, économiste à Valeurs mobilières Banque Laurentienne. Comme le note l'économiste de VMBL, «le facteur numéro un, c'est l'emploi (...) Les revenus générés par le marché du travail n'étaient pas aussi robustes».

En décembre, l'économie québécoise a perdu 48 700 emplois à temps plein et en a créé 39 300 à temps partiel. Une dégradation qui s'est poursuivie depuis.

À Québec, le premier ministre Jean Charest, qui a livré hier son discours inaugural, ne cache pas les effets de la crise sur les finances publiques. «Par effet domino, nous voyons une réduction de la production, de l'emploi, des profits et des impôts, qui se répercute jusque dans les revenus de l'État.»

Le porte-parole du ministère des Finances, lui, se fait rassurant. «Pour l'instant, on ne parle pas de tendance», a expliqué Jacques Delorme. D'avril à décembre, ajoute-t-il, les revenus provenant de l'impôt des particuliers n'ont diminué que de 1,3%.

«En janvier et février, ça devrait être pire parce qu'il y a des pertes d'emplois actuellement», estime pour sa part Yves St-Maurice, économiste en chef adjoint chez Desjardins, Études économiques.

D'ailleurs, lui et son équipe sont à revoir leur prévision de croissance économique pour le Québec. À la fin du mois, ils l'abaisseront de nouveau et prédiront une contraction d'environ 2% de l'économie du Québec. Ça aussi, c'est tout un plongeon, quand on se rappelle qu'en octobre, Desjardins prévoyait une croissance de 0,8%. Une prévision que l'institution de Lévis a abaissée de mois en mois.

M. St-Maurice impute la dernière révision à la lenteur avec laquelle les plans de relance se mettent en branle au Canada et aux États-Unis. «Ça ne va pas aussi vite qu'on pensait», résume-t-il.

Chez VMBL, on garde la prévision de 1,1% de recul. Ce qui peut réconforter les plus optimistes, ce sont les revenus provenant des taxes à la consommation: ils étaient en hausse de 3,2% en décembre et de 1,3% depuis avril.

Deux déficits

Autre élément qui saute aux yeux quand on examine le dernier rapport du ministère des Finances: le Québec sera en déficit pour l'année en cours et la prochaine. Pour cette année, qui se termine le 31 mars, la ministre Monique Jérôme-Forget devra puiser dans sa réserve de 2,3 milliards pour éponger l'encre rouge. Une manoeuvre qu'elle ne pourra pas répéter l'an prochain, puisque sa «sacoche» sera vide ou presque vide.

Ainsi, au 31 décembre, le déficit atteignait déjà 1,53 milliard. Il restait alors trois mois difficiles à l'exercice. Pour l'an prochain, Desjardins prévoit que le déficit atteindra «plus de 3 milliards». Ajoutez à cela 1,5 milliard pour un plan de relance additionnel, et on revient à un déficit avoisinant les 5 milliards de dollars, soit tout près du déficit record de 5,8 milliards de 1994-1995.

À l'époque, il représentait toutefois 3,4% du produit intérieur brut (PIB), comparativement à 1,7% actuellement.