À court terme, les grands déposants de la Caisse de dépôt et placement ne prévoient ni hausses des cotisations ni baisses des prestations pour faire face aux pertes de 39,8 milliards de dollars qu'ils devront se partager, en dépit de contributions nettes de 4,6 milliards.

En fait, si la direction de la Caisse n'avait pas pris la décision de chambouler la répartition de ses portefeuilles après l'effondrement des marchés l'automne dernier, les dégâts auraient été plus considérables.

 

«Notre analyse des événements nous a incités à agir en fonction d'une probable aggravation de la crise en protégeant le capital des déposants et en faisant d'un niveau de liquidités élevé un élément important de notre stratégie pour les mois à venir», a soutenu son PDG, Fernand Perreault.

Pour ce faire, la Caisse a dû vendre des actions et acheter des obligations et des bons du Trésor, un chamboulement de répartition qui lui aura coûté 2 milliards, mais qui paraît justifiée compte tenu de la persistance de la déprime boursière. La pondération en actions est passée de 36,3% à 22,4%, tandis que celle en revenus fixes avançait de 29,6% à 44,3%.

«Dans certains cas, on est allés un peu en bas de la pondération minimale demandée par les déposants, mais on est à l'aise avec ça, a indiqué M. Perreault. La plupart des autres caisses ont agi comme ça.»

Plusieurs déposants ont voulu d'ailleurs rassurer leurs clientèles dans les minutes qui ont suivi la publication des pires résultats de l'histoire de notre bas de laine.

Ainsi, la Régie des rentes du Québec (RRQ), à laquelle contribuent tous les travailleurs et tous les employeurs, assurait qu'elle pourra faire face à ses obligations, malgré un recul de 9 milliards de la valeur de son actif. «Nos cotisations se sont élevées à 9,9 milliards et nos prestations à 9,2 milliards, précise en entrevue son actuaire principal, Pierre Plamondon. Nous n'avons pas eu à toucher à notre réserve.»

Le rendement de -26,4% obtenu par la RRQ aura tout de même retranché 9 milliards à cette cagnotte.

La RRQ devra peut-être toutefois réviser le montant des cotisations l'an prochain quand seront connus les résultats de son évaluation actuarielle en date du 31 décembre prochain. Des consultations publiques sont d'ailleurs prévues, comme c'est le cas tous les six ans.

M. Plamondon rappelle que les cotisations n'avaient pas augmenté par suite des rendements négatifs de 2001 et 2002, bien moins alarmants que ceux de l'an dernier cependant. La Caisse s'était ressaisie durant les cinq années suivantes de sorte que la réserve actuarielle de la RRQ avait pu être renflouée.

Les cotisations à la RRQ des employés représentent 9,9% du salaire brut jusqu'à concurrence de 46 300$. Elles garantissent une rente de retraite annuelle indexée qui vaut ces jours-ci un maximum d'un peu plus de 10 000$.

Du côté de la Société d'assurance automobile du Québec, on a refusé de divulguer le rendement qui a fait fondre son actif de 2,5 milliards. On a cependant précisé par communiqué que les hausses de contributions déjà annoncées pour l'année en cours et 2010 et ne seront pas majorées. Le rendement sera connu au moment du dépôt du Rapport annuel devant l'Assemblée nationale.

À la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), on s'est montré aussi discret, bien que le chiffre de -23% circule. Le Conseil du patronat a d'ailleurs publié un communiqué pour demander que les contributions à la CSST ne représentent pas une charge accrue pour les employeurs déjà aux prises avec un contexte économique éprouvant.

Le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, premier déposant en importante à la Caisse, a indiqué que son rendement sera connu dans deux semaines. Sa part dans l'actif net de la Caisse passe cependant de 29,7% à 28,2% de 2007 à 2008. Sa perte serait donc de plus de 12 milliards. Cela annihile pendant plusieurs années les chances d'amélioration de l'indexation partielle des rentes des retraités du secteur public et parapublic.

La Commission de la construction du Québec (CCQ) est parvenue à tirer son épingle du jeu dans cette année catastrophe. Avec un rendement de -16,99% et la fonte de 1,99 milliard de son actif, elle est parvenue à augmenter son poids relatif parmi les 25 déposants de la Caisse. Voilà pourquoi la CCQ tenait à rassurer ses 80 000 prestataires que leurs rentes ne seraient pas diminuées.