Québecor reprendra le plein contrôle de sa filiale Québecor Média en rachetant la participation de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), qui avait aidé le conglomérat à éviter que Vidéotron ne passe dans le giron de Rogers en 2000.

La CDPQ, qui avait commencé à réduire la taille de son placement en 2012, recevra 1,69 milliard pour ses 17,6 millions d'actions, qui représentent une position de 18,47 % dans Québecor Média.

« Québecor sera désormais mieux outillée pour saisir toutes les opportunités d'affaires qui se présentent et pourra contrôler entièrement sa destinée », a fait valoir mardi son président et chef de la direction, Pierre Karl Péladeau, dans le cadre de son discours pendant l'assemblée annuelle des actionnaires, qui se déroulait au siège social montréalais.

La CDPQ avait pris une participation de 45 % dans Québecor Média en 2000 lorsqu'elle avait injecté 3,2 milliards pour aider le conglomérat à mettre la main, pour 4,9 milliards, sur le câblodistributeur Vidéotron, qui détenait la chaîne de télévision TVA, afin de contrer l'offre de Rogers.

Le gestionnaire de régimes de retraite avait l'option, à compter du 1er janvier 2019, de vendre ses actions restantes de la filiale du conglomérat québécois, notamment par le biais d'un appel public à l'épargne.

M. Péladeau, l'actionnaire de contrôle de Québecor, a souligné à plus d'une reprise l'appui de la Caisse au cours des 18 dernières années, ce qui a notamment permis, selon lui, de maintenir un siège social d'envergure au Québec.

« Ce sont des milliers d'emplois qui ont été créés, a-t-il dit en point de presse. Cela n'aurait pas été le cas si l'on avait donné suite à la transaction de Rogers. Parce que c'est comme cela, le monde est ainsi fait. »

Une transaction profitable

En marge du rendez-vous annuel, Michel Nadeau, qui était le numéro deux de la CDPQ lorsqu'elle a réalisé la transaction avec Québecor en 2000 pour le rachat de Vidéotron, a rappelé à quel point il était nécessaire d'intervenir.

Au cours d'une mêlée de presse, il a expliqué qu'il aurait été difficile, d'un point de vue géographique, de conserver un centre décisionnel au Québec si Rogers avait réalisé la transaction avec la famille Chagnon, propriétaire de Vidéotron.

« J'étais convaincu qu'il fallait bloquer la transaction, a-t-il dit. J'avais vu ce que Ted Rogers avait fait avec Fido (après l'acquisition de 2004). C'était 650 emplois qui avaient été radiés pour être rapatriés à Toronto. »

En échange de ses 17,6 millions d'actions, la CDPQ recevra 1,54 milliard en argent et 150 millions en débentures convertibles qui pourront devenir des actions de catégorie B de Québecor. Le taux annuel d'intérêt de ces débentures de six ans, qui viendront à échéance en 2024, est de 4 %.

La clôture de la transaction, qui doit obtenir les approbations réglementaires habituelles, est prévue d'ici le 22 juin.

« La débenture convertible permet à la Caisse de maintenir une participation dans l'entreprise, tout en procurant à Québecor une flexibilité financière accrue pour poursuivre son plan de croissance », a observé le président et chef de la direction de la CDPQ, Michael Sabia.

Dans une note envoyée par courriel, Drew McReynolds, de RBC Marchés des capitaux, a estimé que la société établie à Montréal payait environ huit fois le bénéfice d'exploitation ajusté de sa filiale pour racheter la Caisse, ce qui, selon l'analyste, est « raisonnable ».

Les ventes graduelles de ses blocs d'actions depuis 2012, combinées aux revenus de dividendes et autres avantages, devraient permettre à la Caisse de réaliser un gain d'un milliard de dollars sur son investissement.

Selon M. Nadeau, le bas de laine des Québécois a décidé de se départir de sa participation dans Québecor Média en faisant valoir que les investisseurs institutionnels ne conservaient pas leurs actions indéfiniment.

« Je pense que la CDPQ se réserve pour une prochaine acquisition de Québecor, a-t-il dit. Il y a d'autres changements qui s'en viennent et cela va coûter beaucoup d'argent. Il faut que la Caisse soit là. »

Résultats en partie conformes

Québecor a également profité de son assemblée annuelle pour dévoiler ses résultats du premier trimestre, période au cours de laquelle l'entreprise a engrangé un bénéfice net de 56,7 millions, ou 24 cents par action. À la même période l'an dernier, ses profits nets avaient été de 3,9 millions, ou deux cents par action.

Stimulés principalement par le secteur des télécommunications, les revenus sont demeurés essentiellement stables, à 1 milliard.

Abstraction faite des éléments non récurrents, le conglomérat a affiché un bénéfice ajusté de 89,6 millions, ou 38 cents par action, par rapport à 74,9 millions, ou 31 cents par action, au premier trimestre de l'exercice précédent.

Les analystes sondés par Thomson Reuters tablaient sur un profit ajusté de 32 cents par action ainsi que des recettes de 1,03 milliard.

Dans la foulée de la transaction avec la CDPQ, Québecor a également annoncé qu'elle doublait son dividende trimestriel, qui passera à 5,5 cents par action.