Kim Lamarre, Alexandre Bilodeau, les soeurs Dufour-Lapointe et Charles Hamelin, tous médaillés à Sotchi, valent désormais combien aux yeux des commanditaires?

Une fois le rêve olympique concrétisé, qu'engendre le gain d'une médaille pour un athlète? Potentiellement des millions pour un Américain. «Mais au Québec, un contrat de commandite de taille frise les 75 000$, note Paul Wilson, spécialiste en marketing et commandite du cabinet de relations publiques National. Deux choses peuvent arriver. Le médaillé peut se faire offrir un job à temps plein comme ambassadeur. On parle de visites auprès de franchisés ou lors de tournois de golf, comme Alexandre Despatie avec McDonald's. Ou alors, il peut être approché pour une campagne publicitaire.»

Que des Alexandre Bilodeau et Justine Dufour-Lapointe se le tiennent pour dit! Si l'or a naturellement un pouvoir d'attraction plus grand, il y a des exceptions.

«La médaille de bronze remportée en plongeon à Atlanta, en 1996, a valu une belle carrière à Annie Pelletier, estime Paul Wilson. Sa beauté et l'attrait pour son sport y ont beaucoup contribué. La médaille d'or de Charles Hamelin en patinage de vitesse vaut cher, mais moins puisque son sport, si spectaculaire soit-il, perd en popularité une fois les Jeux terminés. Cela dit, comme les entreprises recherchent des gens qui symbolisent l'effort et le dépassement de soi, Hamelin pourrait attirer leur attention.»

Cela dit, il faut être bien perçu par les commanditaires potentiels, même une fois les compétitions bouclées, car ils n'ont jamais eu autant de contacts avec les personnalités sportives grâce aux réseaux sociaux.

«La visibilité des athlètes sur Twitter et Facebook les aide à signer des contrats, reconnaît Philippe R. Bertrand, vice-président d'Équation Humaine, spécialisée en marketing numérique. Le rayonnement d'Alexandre Bilodeau sur les réseaux traditionnels et sociaux est très fort. Sa valeur a probablement doublé depuis le gain de sa médaille.»

Les réseaux sociaux sont cependant un couteau à double tranchant. «Les médaillés doivent bien tirer leur épingle du jeu, avoir une présence constante et pertinente, en postant par exemple des photos de leur entraînement, mais aussi éviter les dérapages. La marque va regarder ce que l'athlète fait sur Twitter et qui le suit. Par ailleurs, plus il est suivi par des gens influents, d'autres grands athlètes par exemple, plus c'est intéressant pour le commanditaire potentiel qui pourra se faire valoir sur des réseaux secondaires.»

Le bémol d'un autre expert

«Les athlètes canadiens qui performent à Sotchi n'auront pas autant de propositions à leur retour au pays qu'on le laisse croire, estime Pascale Chassé, vice-présidente et spécialiste en commandite de Cossette. Oui, ils auront des contrats pour de la publicité, des conférences et des apparitions en public, mais peu de marques offriront leur engagement total à un athlète, comme l'a fait McDonald's avec Alexandre Despatie pendant plus de 15 ans. Au Canada, les marques se gardent une gêne face à la commandite d'athlètes. Les grandes entreprises comme Bell, Visa, P&G et Saputo privilégient davantage la commandite d'un groupe d'athlètes, parce que cela les positionne comme commanditaire des Olympiques, augmente leur chance d'être associées à un gagnant et, surtout, élimine les risques de crise, comme celle qu'a connu Rona, il y a plusieurs années avec Geneviève Jeanson.»

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Quels contrats potentiels?

> Alexandre Bilodeau (or en ski acrobatique-bosses)De 50 000$ à 200 000$

«Il pourrait représenter une banque et trois autres entreprises, dit Paul Wilson, spécialiste en marketing et commandite du cabinet de relations publiques National. Il est très aimé. C'est le médaillé avec le plus grand potentiel. NBC a même fait un long reportage sur lui cette semaine [...]. Comme Alexandre Despatie, il s'exprime bien, il a une belle gueule et il utilise les médias sociaux à bon escient», ajoute Philippe R. Bertrand, d'Équation Humaine.

> Justine Dufour-Lapointe (or en ski acrobatique-bosses)

De 50 000$ à 200 000$

«Elle a du charme, elle a remporté l'or... ça vaut des sous! Elle a une belle carrière devant elle, dit Paul Wilson. Le trio Maxime-Chloé-Justine Dufour-Lapointe vaut aussi quelque chose. Si j'étais leur agent, j'approcherais les entreprises de produits de beauté comme L'Oréal. Une banque pourrait également les solliciter si elle veut rajeunir son image.» «Il y aurait un avantage certain pour un commanditaire de les embaucher toutes les trois, car il ne paierait pas trois fois le prix, poursuit Philippe R. Bertrand. Mais comme l'argent crée des conflits, il faudra une certaine entente entre les soeurs pour s'assurer que le trio reste solide.»

> Mikaël Kingsbury (argent en ski acrobatique-bosses)

De 50 000$ à 60 000$

«Il est dans l'ombre d'Alexandre Bilodeau, mais il est intéressant, dit Paul Wilson. C'est le poulain qui continue de grandir. Il pourrait aller se chercher deux commandites de 25 000$ à 30 000$. Une marque créative pourrait s'amuser avec lui.»