La polémique souvent passionnée autour de la laïcité au Québec, avec la proposition d'interdire tout port ostentatoire de signes religieux, a été mise à profit par le concessionnaire des mythiques Harley-Davidson à Québec sur le thème «à chacun sa religion».

La campagne publicitaire vise clairement les deux symboles religieux qui alimentent la polémique depuis plusieurs semaines, à savoir le port du hijab pour les femmes de religion musulmane ou le crucifix de la religion catholique qui trône au-dessus du président de l'Assemblée nationale à Québec.

Impossible de manquer les grands panneaux publicitaires sur les routes autour de Québec montrant, sur fond noir, la moitié d'un joli visage d'une jeune femme arborant un hijab bleu et pour l'autre moitié une jeune femme aux longs cheveux blonds avec un casque de moto et un blouson de cuir de la marque américaine des célèbres motos avec la phrase-choc en lettres blanches «À chacun sa religion». Pour l'autre publicité, toujours sur fond noir, la croix en bois du catholicisme et coupée dans sa longueur à moitié avec en miroir sur l'autre moitié une moto toujours avec le même slogan rappelant pour les adeptes que posséder une Harley est une véritable religion.

«Pas très religieuse»

Cette campagne, comme c'est souvent le cas de ces messages publicitaires profitant de débats passionnés sur un sujet de société, a déclenché la polémique sur les réseaux sociaux avec des centaines de commentaires sur Facebook.

Se disant «pas très religieuse», Céline Couturier sur ce réseau social trouve que l'agence créatrice de la campagne, 32 Mars, va «trop loin» et met «de l'huile sur le feu». Stefan Larin se demande «pourquoi associer le nom Harley à cette controverse du voile» sachant que les femmes voilées ne sont pas leur clientèle. Des menaces ou des insultes sont également adressées à l'un des principaux concessionnaires Harley-Davidson en Amérique du Nord.

«Le but ultime était de faire parler de nous, si certaines personnes sont choquées, c'est qu'elles ne comprennent pas que l'on parle de religion au second degré», déplore à l'AFP Charles Gosselin, directeur-adjoint de Prémont Harley-Davidson.

Le gouvernement du Québec a déposé un projet de loi sur la Charte des valeurs qui interdirait à toutes les personnes accueillant du public l'interdiction de porter un signe religieux de façon visible. Plusieurs manifestations ont déjà été organisées par les partisans et les opposants à cette Charte dont le gouvernement s'est dit prêt à en aménager certains points.

Laurent Prémont, propriétaire et patron de la concession, reconnaît que lancer une telle campagne en novembre - avec déjà une bonne couche de neige au sol - n'est pas la meilleure période pour vendre des motos, mais le débat entourant la Charte représentait une excellente opportunité. «L'agence 32Mars nous a proposé le concept et on a dit oui sans hésiter», déclare M. Prémont. «Ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion de s'associer à un tel battage médiatique, et à l'approche des fêtes, c'était notre chance d'attirer plus de clients en magasin», poursuit-il. Les ventes de produits dérivés sont une part importante du chiffre d'affaires pour les concessionnaires Harley.

Les fans de Harley semblent ravis. Jean Perron sur Facebook dit préférer «la religion Harley» quand un autre sur Twitter et sous le pseudo Épris de Justice trouve la pub «géniale» même si «çà ne va pas plaire aux extrémistes».