La façon de faire va à l'encontre des règles établies par les investisseurs sérieux: peu de temps pour réfléchir à la proposition d'un entrepreneur. À peine 30 minutes...

L'émission Dans l'oeil du dragon, dont le deuxième épisode est diffusé ce soir à Radio-Canada, s'apparente à du «speed-dating», de l'aveu de son producteur Louis Laverdière, de Cité Amérique. «C'est un deal de napkin! illustre-t-il. On va avoir un impact immense dans le milieu des affaires, mais en oeuvrant de façon totalement contre-indiquée! Cela dit, les dragons veulent faire de l'argent très sérieusement.»

Une occasion en or

Pour les 80 et quelque entrepreneurs de cette première saison québécoise - l'émission en est à sa 10e année en Angleterre et 7e à Toronto - c'est une occasion en or. Lundi dernier, même si les représentants de Cartouches certifiés ont mordu la poussière, ils ne sont pas passés inaperçus. «On a eu plus de clientèle, de demandes de renseignements et de visites sur notre site internet cette semaine, affirme le président et cofondateur de l'entreprise créée en 2006 et au chiffre d'affaires de 1,5 million. On a aussi eu des appels de fournisseurs et d'investisseurs potentiels, souligne Matthieu Laroche. Même des pourparlers en vue d'un partenariat.»

Sur le plateau, les cinq investisseurs, les dragons Danièle Henkel, Normand Legault, Gaëtan Frigon, Dany Vachon et François Lambert, ne boudent pas leur plaisir.

«On me dit que j'ai toujours eu du pif, dit Gaëtan Frigon, président de Publipage. Ça prend quelqu'un capable de juger en quelques minutes une présentation. On va vers la qualité de l'entrepreneur plus que son produit.»

Chaque dragon devait se commettre pour des investissements totalisant 200 000$, lors des huit enregistrements qui se sont déroulés en mars à Québec. «Certains ont investi le double, dit Louis Laverdière. Il y a eu 26 propositions d'affaires qui se sont soldées par 17 deals.»

Une émission nécessaire

Cette émission est nécessaire pour une classe d'entrepreneurs inintéressants pour les banques, selon Gaëtan Frigon. «Souvent, l'entrepreneur ne sait pas quoi faire pour avoir du financement, souligne-t-il. La banque veut des faits. Alors que les dragons vont le considérer avec un oeil différent. On va s'attarder à la façon avec laquelle il décrit son produit, à sa réaction pendant sa présentation.»

«L'émission n'est pas éducative, mais on a comme souci de révéler une réalité, dit Louis Laverdière. On a assisté en audition à toute une panoplie de cas. De l'inventeur-créateur dans sa bulle qui n'a aucune idée du monde des affaires à des gens très articulés et bons gestionnaires.»

Pour le candidat, Dans l'oeil du dragon est aussi un cours. «On briefe un peu l'entrepreneur, plus axé sur la qualité de son invention, mentionne Louis Laverdière. On dit à certains de bien jauger la valeur de leur entreprise, de bien justifier cette valeur devant les dragons. Idéalement, on aimerait encadrer mieux, mais ça prend beaucoup de ressources.»

S'attendre à tout

Face aux dragons toutefois, l'entrepreneur-candidat doit s'attendre à tout type de commentaires et réactions! «Il y a des exemples d'erreurs et on se sent obligés d'en témoigner, dit Louis Laverdière. Ailleurs, les dragons sont très durs. Au Québec, on ne pouvait pas agir de cette façon, car notre communauté est trop tissée serrée. Mais on doit quand même être rigoureux. Il y a une façon de dire la vérité, de donner l'heure juste sans blesser.»

Mais qu'est-ce qu'un commentaire négatif pour une pub inestimable? Même devant un demi-million de téléspectateurs, comme lors de la première émission. Depuis son passage, l'entreprise de chansons personnalisées Folifola a vu son site internet exploser... dans le premier sens du terme! Et le nombre de visiteurs de l'entreprise de vêtements KLS est passé de 206 à plus de 3000 après être tombée Dans l'oeil du dragon...