Un i décliné de dizaines de façons depuis deux jours. Devant les mots tristesse, paradis et le nom de Steve Jobs. Une pomme avec le profil du créateur dessinée par l'étudiant en graphisme Jonathan Mak ou surmontée d'une chandelle, une idée de l'agence Publicis Montréal. Normal quand on a une image de marque plus grande que nature!

> Suivez Isabelle Massé sur Twitter

Pour les créatifs en publicité et les spécialistes des marques, Apple est aussi bien synonyme d'innovation dans l'objet que dans l'image de marque. On pense à la pub orwellienne réalisée par Ridley Scott en 1984 pour l'ordinateur personnel Macintosh. On pense aussi à la dénomination des appareils plus récents: iPod, iPhone. En passant par le design épuré des Apple Store. Le contenu et la façon de le promouvoir ont autant fait mouche que le contenant, à l'ère Steve Jobs. «Apple ose dans son marketing, dit Jonathan Rouxel, codirecteur de la création de l'agence BCP. On a toutefois connu différentes périodes. Avant, la pub était très inspirationnelle. Aujourd'hui, le produit est tellement innovant qu'on est obligé de nous montrer comment il fonctionne! Autant l'iPod était un lancement très design, vibrant, jeune et coloré, autant celui de l'iPhone faisait appel au côté droit du cerveau. Ça m'a laissé plus froid d'un point de vue de publicitaire, mais je comprends l'enjeu marketing.»

«Dans les années 80, Apple, c'était la contre-culture, poursuit Luc Dupont, professeur agrégé au département de communication de l'Université d'Ottawa. Le message 1984 mettait face à face David et le Goliath de l'époque, IBM. Par la suite, on est passé à l'image de la culture populaire du moment, extrêmement individualiste, à l'image de dizaines de personnes qui écoutent leur musique sur un iPod de leur couleur préférée, par exemple.»

Apple a été la première entreprise à mettre le produit au coeur du discours marketing, aux yeux de Nicolas Dion. «Ce qui distingue la mise en marché d'Apple, selon moi, c'est la clarté de la ligne de pensée et la discipline dans toutes les formes d'exécution, dit le directeur de création de lg2. Steve Jobs a réussi à trouver une ligne directrice au coeur de chacun de ses produits: la simplicité. Souvent, les entreprises ont une vision claire de ce qu'elles veulent communiquer, mais elles se perdent en cours d'exécution à force de vouloir répondre aux impératifs de mise en vente.»

En 2010, on a souligné le mauvais choix de nom pour la tablette numérique d'Apple (iPad) et les trois interminables semaines prises par l'entreprise avant d'admettre les problèmes de réception de l'iPhone 4, lors de son lancement. Mais les ventes phénoménales de ces deux appareils ont vite fait oublier ces écueils.

Aujourd'hui, qu'est-ce qui incarne particulièrement bien la marque? Les boutiques Apple, notamment. «En les regardant, on sent les produits et les publicités, note Nicolas Dion. L'ADN de la marque est devenu un lieu physique. Souvent, le marketing, c'est un slogan et des images. Steve Jobs a montré que ça pouvait devenir un escalier, des employés....»

Et puis, il y a... Steve Jobs lors de ses présentations de nouveaux produits. «Il y a toujours un côté divertissement, souligne Jonathan Rouxel. Il sait créer l'excitation, l'enthousiasme et la cohésion au sein d'un groupe.»

Luc Dupont rappelle la présentation théâtrale du Macintosh en 1984: «Steve Jobs est arrivé avec un sac à la main, en a sorti un ordinateur, une souris et, de sa poche, une disquette. Devant nous, on a vu un ordinateur qui parle. Instantanément, la foule s'est mise à applaudir de façon frénétique.»